[Terminé] L'amour du spectacle [ft: Cordélia]

Des émissions de télévision, en live sur internet... bien des choses auxquelles Lilith n'avait jamais eu accès, jusqu'à maintenant. Ou bien, à très petite dose, il lui était parfois arrivé de s'arrêter devant une télévision allumée dans un magasin lors de flash d'informations, pour se tenir au courant des évènements importants. A part ça, rien à signaler, cela confirmait bien ce qu'elle avait pensé. Oh, peut-être avait-elle eu l'occasion un jour de voir une affiche ou deux avec Cordélia en vedette dans la rue? Aucune chance qu'elle ne l'ait gardée en mémoire simplement grâce à ça toutefois.

Alors, son boulot, c'était d'être visible? Plus elle se montrait, en tout cas d'une façon qui plaise à son public, plus son succès grandissait, plus elle rapportait d'argent. Rien qu'y penser épuisait déjà la vagabonde. D'une certaine façon, elle se disait que cela ressemblait un peu au métier des Champions de Galar, mais... eux pouvaient tout de même se permettre de montrer une image d'eux-même plus personnelle, car ce qui comptait le plus restaient leurs perfomances sportives. De beaux matchs et des victoires, c'était le signe de plus de succès. L'image n'était qu'un bonus, non négligeable, mais pas nécessaire.

— Depuis que t'es enfant?! s'étonna-t-elle en rebondissant sur cette dernière information.

Elle ne savait même pas quoi dire de plus, ni même quoi en penser. Elle ne parvenait pas à imaginer un enfant devoir faire attention à tout cela. Au final, Lilith la plaignait presque d'avoir vécu une telle vie. Ironique, au vue d'à quoi ressemblait sa propre enfance. Mais bon, si cet environnement lui plaisait, et qu'elle s'y épanouissait, n'était-ce pas l'essenciel? Cordélia fut interrompue par la vibration de son téléphone, mais sembla volontairement choisir de ne pas répondre tout de suite pour plutôt poursuivre leur conversation. Ce n'était sûrement rien de très important.

A son tour, Cordélia lui posa quelques questions, semblant chercher à en savoir un peu plus sur la vagabonde un peu trop singulière qu'elle avait en face d'elle. Elle lui demanda d'abord si quelqu'un gérait sa carrière, avant de parler un peu plus de sa propre expérience. Elle ne savait pas ce qu'elle serait devenue sans ce monde de lumière et de popularité. Au moins, pour l'épanouissement, c'était confirmé, pensa Lilith. Une réflexion qui lui décrocha un sourire compréhensif, d'autant plus quand elle finit par lui poser une question semblable:

— Lilith, si tu n'avais pas la musique et tes Pokémon, que serais-tu devenue?

La musicienne regarda Star avec ce même sourire, haussant tout de même un sourcil le temps d'une brève réflexion, avant de replonger son regard sur la mannequin, et de répondre le plus naturellement du monde, dans un rire mi-nerveux mi-amusé en y repensant:

— Bah sans lui je serais sûrement pas là pour te parler, alors...

Trop direct? Peut-être. Ça méritait sans doute un peu plus d'explication, ou au moins de nuance. Après tout, Cordélia venait de lui en dire plus sur elle et sa vie, alors elle ne voyait pas de problème à faire de même de son côté. L'ambiance s'était nettement détendue, et Lilth préférait amplement cela.

— Mais non, j'ai personne qui s'occupe de ma carrière. En fait, j'ai même pas de carrière, avoua-t-elle. Le type de tout à l'heure je l'ai rencontré qu'aujourd'hui. Je crois que sans la musique et mes Pokémon, je serais pas grand chose aujourd'hui.

Même si elle avait survécu aux difficultés et aux dangers de la rue. Elle avait toujours été toute seule, elle et Star contre le monde, armée de sa guitare. C'était littéralement tout ce qu'elle avait, et cet instrument était d'ailleurs son bien le plus précieux.

— En fait, j'suis venue à Maïlys un peu au hasard pour percer avec ma musique. C'est difficile de se faire remarquer à Galar quand on est pas un super Dresseur. Finalement, ça se sera vraiment pas passé comme prévu, conclut-elle en ricanant à nouveau, plus sincèrement cette fois.

Après tout, cette situation ne lui déplaisait pas, tout au contraire. Elle s'était trouvé une voie à suivre et un but à accomplir. Restait à profiter du chemin qui l'attendait jusqu'alors en faisant de son mieux pour rester fidèle à ses principes.

— Je préfère te savoir musicienne que Dresseuse, annonça-t-elle. Tu n'as pas besoin de ça en plus, pour faire tes preuves et démontrer ton talent.

Lilith ne répondit que par un rire gêné, et cru même reconnaître un ricanement dissimulé de Star. Non pas qu'il était gêné, mais il se retenait aussi fort que possible de se moquer de son amie. Alors, elle ne portait pas les Dresseurs dans son cœur, hein? Après tout, certains pouvaient être de véritables ordures, elle n'en doutait pas. Sans doute avait-elle vécu une mauvaise expérience qui lui était restée en travers de la gorge. Difficile de lui en tenir rigueur, en tout cas, mais la vagabonde cherchait déjà un moyen d'essayer de tourner la conversation autrement, sans chercher à partir dans un not all Dresseurs qui aurait été gênant pour tout le monde.

— Je trouve ça bien plus noble de ta part, de parcourir le monde pour que tu partages ta musique et tes émotions, plutôt que te prouver quoi que ce soit et soigner un complexe d'infériotié sur des gamins ou des personnes égoïstes.

Définitivement une mauvaise expérience, et elle tapait fort. Si elle n'avait pas entendu tant d'histoires d'amour qui avaient mal finies autour d'un verre de trop, la musicienne mettrait sa main à couper qu'elle parlait de l'un de ses ex. Tout de même touchée par le compliment, qui au final avait un goût doux-amer, elle adressa à la jeune femme un sourire un peu taquin, comme pour montrer au passage qu'elle avait bien compris le message, tout en lui répondant:

— Je fais c'que je peux pour apporter du bonheur autour de moi, pas comme tout le monde.

Finalement, cette dernière remarque la fit presque se rappeler qu'elles se trouvaient encore au milieu d'un couloir avec pas mal de passage. Pourquoi ne pas continuer cette conversation dans un endroit pour agréable, finalement? Alors qu'elle s'apprêtait à reprendre la parole pour l'inviter ailleurs, elles furent interrompues par l'arrivée d'un homme, qui était de toute évidence le fameux agent de la mannequin, l'appelant pour son prochain rendez-vous.

Cordélia ne semblait pas avoir vu l'heure passer, et Lilith devait bien admettre s'être prise au jeu. Ce qui avait très mal démarré s'était finalement révélé être une rencontre plutôt agréable. Dommage qu'elles aient été rattrapées par l'emploi du temps visiblement chargé de la nouvelle arrivante sur l'île. Celle-ci d'ailleurs, sembla vouloir approcher sa main de Star, peut-être pour lui adresser une petite caresse d'au revoir, avant de se raviser. Oh, ça prendrait un peu de temps, mais cette petite boule de poils arriverait à gagner son cœur, elle n'avait aucun doute là-dessus.

— Lilith, je suis certaine que nous serons amenées à nous revoir en tant qu'artistes! Ce sera avec plaisir que nous bavarderons et cette fois, dans un cadre plus sympathique qu'un couloir avec plus de temps devant moi. Je vais devoir te laisser.

Elle avait plutôt bien résumé la situation, finalement.

— Ça marche! Si ça te tente la prochaine fois qu'on se croise, je t'inviterais à boire un verre, ça sera quand même plus cool.

Bien sûr, en bonne charmeuse qui se respectait, elle avait accompagné son invitation d'un petit clin d'œil pour habiller elle aussi ce sourire contagieux qu'elle avait tendance à arborer. Finalement, elle aura quand même su caser son invitation avant qu'elles ne prennent chacun la route de leurs côtés, en espérant que son manager n'était pas également chargé de trier les personnes avec qui elle prenait des verres...

... A bien y réfléchir, c'était sans doute le cas.

L'enfant des rues adressa un signe de la main à sa nouvelle amie en guise d'au revoir, et put elle aussi repartir à ses occupations. Cette étape de son voyage était passé, une première étape vers une nouvelle vie, peut-être? La musique restait après tout son premier amour, et ce premier pas ressemblait à un immense pas de géant pour elle. Restait à voir désormais où le vent la conduirait.