Prémices à l'envol [Inoke] [Terminé]

Entre son travail, et désormais son arène, Inoke était consciente qu'elle n'aurait bientôt plus beaucoup de temps pour elle. Les vacances se feraient rares, car elle devrait rester disponible autant que possible pour affronter de jeunes dresseurs, ou pour effectuer quelques missions au nom de la Ligue.
Alors, lorsqu'elle eut l'occasion de profiter d'une journée entière à Port Sableye pour se détendre, elle avait sauté dessus. Elle avait attrapé un foulard léger en prévision du temps bien plus clément que celui de la ville septentrionale, et avait pris le premier bus de la matinée.

Aux côtés de sa sœur Kai, elle avait commencé par un tour de la ville, à flaner entre les boutiques et autres lieux touristiques rebâtis il y avait quelques temps de cela. Elle prenait bien sûr soin de se laisser le temps de souffler, pour ne pas être forcée d'écourter cette journée à cause de sa santé, surtout dans une ville où l'air était si étouffant, mais la jeune femme et son Magirêve comptaient bien en profiter autant que possible.

Elle avait fini par s'acheter une bonne glace au parfum de vanille et chocolat, pour venir la déguster sur les places de la ville portuaire. Elles n'étaient pas aussi fréquentées que lorsqu'elle y passait du temps petite, mais quelques personnes venaient encore s'y poser avec leurs Pokémons profiter du soleil écrasant.

Elle s'était installée sur le sable, assise en tailleur à déguster sa glace, pendant que Kai faisait léviter la sienne pour la manger avec gourmandise. Elle entendit soudain quelqu'un crier, la faisant aussitôt sursauter.

—IL N’Y A RIEN A FAIRE POUR COMBATTRE L’ENNUI, ICI ?!

Inoke tourna la tête vers l'origine de cette voix, qui était une jeune femme accompagnée par ses Pokémons. Si elle n'allait pas bouger pour engager la conversation, n'étant pas vraiment sociale hors de ses heures de boulot, Kai, elle avait sauté sur l'occasion pour aller la voir.

La championne se leva en sursaut à la poursuite de son Pokémon, lançant discrètement des "Reviens ici!" et autres "Kai arrête!", alors que la Magirêve s'approchait de la dresseuse ennuyée.

Une fois arrivée à son niveau, elle se mit à tourner autour d'elle, et à faire flotter sa glace devant elle pour lui en proposer un morceau, bien vite suivie par Inoke qui semblait rouge de honte.

— Kai! Papa et maman t'ont pas appris la politesse? pesta-t-elle contre son Pokémon. Désolée, continua-t-elle à l'adresse de la jeune femme. Elle a une fâcheuse tendance à se mêler de ce qui la regarde pas.

Le Pokémon Spectre de son côté ne semblait pas désolée pour un sou. Cette jeune fille semblait avoir des soucis, qu'ils soient importants ou non, et Kai essayait toujours de rendre le sourire aux autres avec son énergie et sa bonne humeur contagieuse. Elle tendait d'ailleurs toujours sa glace aux fraises à l'inconnue en la faisant flotter dans les airs pour lui proposer de la partager.

— Oh, ne vous en faîtes pas. J'ai aussi eu un Pokémon qui partait faire ce qu'il voulait, et n'en avait rien à faire de ce que je pouvais dire...

Elles avaient eu de la chance d'être tombée sur une personne compréhensive, qui ne leur attirerait pas d'ennuis. Bien sûr, Inoke comprenait le désir de sa sœur d'aider les autres sans se poser de questions, mais elle avait tendance à être facilement gênée par son ouverture aux inconnus, elle qui était plutôt du genre introvertie. Surtout ses jours de congé.

Kai avait ressenti ces relans d'émotions négatives qu'avaient dégagé cette Dresseuse, en parlant de ce Pokémon qu'elle avait. A vrai dire, la championne avait elle aussi remarqué ce changement dans son regard. Peut-être une certaine nostalgie, mélangée à de l'inquiétude.

— Et... elle n'est pas spécialement dérangeante, ce n'est vraiment pas grave.

La Magirêve ne put s'empêcher de lancer un regard mesquin à sa sœur entendant cela, comme pour montrer sa fierté d'avoir eu raison. La seule réponse de la frangine fut de soupirer, avant de serrer la main tendue par cette inconnue.

— Vous êtes une dresseuse? Je m'appelle Maya, et voici mes amis! ajouta-t-elle en désignant les petites créatures qui l'accompagnaient. Puisque votre Magirêve semble vouloir s'amuser, que diriez-vous de les laisser jouer ensemble? Je dois avouer qu'en ce moment, on n'a pas souvent eu le temps de s'arrêter pour jouer.

— Je m'appelle Inoke, se présenta à son tour la championne. Et elle c'est Kai. Enchantée.

Sa voix était, comme à son habitude, assez effacée, mais sincère. Elle semblait presque chercher ses mots pour pourtant dire des choses simples.

— Qu'est ce que t'en dis Kai? Nous non plus on a pas vraiment pu se poser ces derniers jours, tu devrais en profiter.

Après tout, devenir Championne d'une Arène officielle avait nécessité beaucoup de préparation, et de paperasse, également, à en donner la migraine. Après ce jour de repos bien mérité, elle ne savait pas quand elle pourrait en profiter à nouveau.
Kai de son côté ne s'était pas faite prier pour aller jouer avec les compagnons de Maya, venant flotter avec légèreté autour d'eux en continuant de déguster sa glace.

— Oh, et.. oui, je suis dresseuse, ajouta-t-elle en s'apercevant qu'elle n'avait pas répondu à sa question. Mais je ne voyage pas beaucoup. A la place, j'ai un Café de combat à Bordeciel.

Elle n'avait pas l'habitude de se présenter en tant que Championne, alors cette introduction suffirait bien pour le moment. A dire vrai, ce statut la gênait encore un peu. Elle ne se voyait pas encore l'annoncer comme une normalité, comme son titre au quotidien, elle qui ne l'avait obtenu que récemment.

Inoke pouvait compter sur Kai pour remonter le moral des petits compagnons de cette dresseuse, ou au pire leur changer les idées quelques instants. Son tempérament joueur et sa bonne dose d'énergie positive avait généralement cet effet là. Si les Magirêve se nourissaient habituellement d'émotions négatives, ou de peur, Kai préférait généralement faire rire ceux qui l'entouraient. Inoke se disait qu'elle avait été comme ça depuis qu'elles étiaent nées de toute façon, et que ce n'était pas prêt de changer.

Ainsi, la jumelle se concentra sur la conversation avec cette Maya, qui semblait intriguée par son établissement.

— Un Café de combat ..? Je vois... je passerai un de ces jours!

Cette remarque fit sourire la cafétière, qui restait fière de cette idée de s'inspirer des établissements Kalosséens et Galariens qui avaient une belle réputation à l'internationale. Ici à Maïlys, ces endroits étaient plus rares, ce qui avait inévitablement participé à son succès.

— Avec plaisir! répondit-elle avec un certain enthousiasme. Je suis toujours contente d'accueillir des Dresseurs de tous horizons.

Après tout, là était le but premier de cet endroit: faire venir le voyage jusqu'à elle. Même si aujourd'hui elle rencontrait cette personne pour la première fois, elle savait bien que les gens étaient toujours plus enclins à raconter leurs histoires autour d'une délicieuse boisson chaude ou de quelques pâtisseries.

Mais cette Dresseuse sembla soudain perdue dans ses pensées, un comportement qui était loin d'être inconnu pour Inoke, qui se laissait souvent elle aussi flâner au hasard, ou plutôt au bon gré de sa capacité de concentration.

— Oh pardon! s'exclama-t-elle une fois revenue à la réalité. Je me demandais, tenir un café n'est pas trop frustrant? Vous n'avez pas envie de combattre, parfois? Avant, je n'aimais pas me battre, mais désormais... si je voyais autant d'animation, je ne parviendrais peut-être pas à me retenir!

C'était donc cela qu'elle avait en tête? Peut-être s'était-elle imaginé quelques secondes à sa place. En tout cas, elle s'était trompée sur une chose, qui fit rire légèrement la Championne.

— Ce serait frustrant si je ne me battais pas aussi, dit-elle dans son rire. Les gens se battent entre eux parfois, mais beaucoup viennent pour nous combattre, mon équipe et moi, expliqua-t-elle. J'ai ouvert ce café pour pouvoir m'améliorer, parce que je ne peux pas beaucoup voyager moi-même.

Avec les années, elle restait fière de son idée. Alors que d'autres à sa place auraient sans doute abandonné l'idée de devenir un Dresseur puissant et renommé sans la possibilité de voyager avec ses compagnons, elle n'avait jamais rien lâché. Après la théorie, elle avait trouvé une idée pour passer à la pratique, et ses efforts avaient fini par payer.

— Alors vous aimez les combats Pokémon vous aussi? C'est vrai que c'est un peu difficile de s'y mettre parfois, mais les liens qu'on développe avec eux quand on se bat et qu'on s'entraîne à devenir meilleurs sont tellement... particuliers. Ça devient difficile de s'en passer.

C'était un peu son ressenti sur ces combats, que certains n'appréciaient absolument pas. Il était vrai qu'ils pouvaient paraître un peu barbares parfois, d'un point de vue extérieure... mais le Dresseur et ses Pokémons évoluaient ensemble et finissaient par tisser quelque chose qui ne pouvait se créer autrement. Du moins, c'était l'impression qu'elle avait toujours eu. Sans les combats Pokémons, elle n'aurait de toute façon jamais rencontré les amis exceptionnels qu'elle avait désormais, confortablement installés dans leurs Pokéballs douillettes.

Inoke regardait sa sœur Kai jouer avec les pokémons de cette dresseuse avec un air attendri. Elle appréciait toujours la voir si joyeuse, elle qui au contraire avait souvent un air un peu plus morose. Malgré tout ce qu'elles avaient pu avoir en commun, il n'avait jamais été très difficile de les différencier à cause de cela.

Elle écoutait en même temps la réponse de son interlocutrice, sans trop s'égarer dans ses pensées. Cette conversation avait réussi à l'attraper et à ancrer son esprit. Parler de combats, mais surtout de Pokémons et des liens qui se formaient entre eux et leurs dresseurs était toujours un sujet qui faisait mouche chez elle. Un sujet dont elle ne se lassait pas au fil des années. C'est sans aucun doute en partie grâce à cette passion qu'elle était d'ailleurs devenue championne.

— Vous devez être forte, alors, si tant de gens viennent vous affronter! avait-elle constaté. Apprendre ça me donne encore plus envie de me mesurer à vous!

Cette remarque fit sourire Inoke, qui s'était tournée de nouveau vers elle. La championne était contente d'avoir réussi à attirer son attention, même sans vraiment le vouloir. Elle avait attisé sa curiosité, et il était vrai que ce genre de chose arrivait souvent.

— Mais aujourd'hui, j'ai choisi de me reposer... et mes Pokémons ne sont pas vraiment d'humeur, je pense. Nous avons subi plusieurs défaites écrasantes ces derniers temps... mais c'est mon tour de me montrer à la hauteur!

A force de cotoyer des dresseurs de tous lieux et âges, et de les entendre raconter leurs histoires, les aventures et mésaventures, leurs victoires comme leurs échecs, Inoke avait fini par développer une sorte d'instinct pour les comprendre.
Elle avait su entendre dans la voix de la jeune femme qu'il y avait autre chose que des défaites qui la préoccupait. Ou peut-être que ses défaites avaient eu des conséquences plus graves? Après tout, certains dresseurs peu scrupuleux utilisaient des combats avec leurs Pokémons pour commettre des méfaits en toute impunité.

Ces petites bêtes font de parfaits compagnons, mais leur puissance peut parfois être terrifiante.

—Oui, j'aime les combats! ajouta-t-elle ensuite pour répondre plus clairement à sa question. Enfin, j'ai fini par les aimer. A force de devoir me battre pour gagner, et vivre, j'ai appris à combattre pour le plaisir, et constater mes progrès! raconta-t-elle. Et même la confiance que mes amis ont en moi n'a fait qu'augmenter, même si je ne l'ai pas toujours vu. En arrivant ici, je n'y connaissais rien en Pokémons, et en combats. Mais maintenant... ça m'arrive de penser que je ne suis plus la même personne. En bien, je veux dire! Je ne sais pas si j'arrive à rendre sa clair... même si ça peut apporter des ennuis, c'est tellement gratifiant, vous voyez?

C'était un effet qu'Inoke avait sur les gens. Peut-être était-ce juste une déformation professionnelle, cette aura qui l'entourait, mais les gens qu'elle rencontrait, et avec qui elle ouvrait la conversation, avaient tendance à facilement lui raconter beaucoup de choses sur eux. Peut-être que cette jeune dresseuse aimait également raconter ses voyages à autrui, mais ce n'était pas une prémière pour la cafétière, qui laissa d'ailleurs filer un petit rire quand son interlocutrice commença à se perdre un peu dans ses histoires, sans savoir si elle était bien claire.

—Je comprends ce que vous voulez dire, répondit-elle à la fin de son récit.

Elles avaient des parcours très différents à première vue. La championne, de son côté, s'était toujours intéressée aux Pokémons. Elle s'était d'ailleurs toujours dit qu'elle deviendrait dresseuse. Pourtant, elles avaient toutes les deux ce même point de vue sur les combats.

—C'est vrai qu'il n'y a pas que les liens qu'on tisse avec nos Pokémons, les combats changent aussi le dresseur, ajouta-t-elle. Mais je suis... désolée que vous ayez eu à combattre pour survivre, par le passé.

Inoke hésita un instant avant de continuer. Elle n'avait pas vraiment envie de se mêler des problèmes d'une parfaite inconnue, qu'elle venait à peine de rencontrer. Mais elle avait une âme généreuse avant tout, et son nouveau statut de championne, sensée mettre à l'épreuve la prochaine génération de dresseurs, mais aussi protéger l'île des menaces, faisaient qu'elle ne pouvait s'empêcher de poser cette question.

—Ces problèmes sont derrière vous, maintenant? demanda-t-elle pour s'en assurer. Je veux dire, les défaites dont vous parliez... ça n'a rien entraîné de grave, n'est-ce pas?

Si elle avait des problèmes, la championne au Magirêve espérait au moins être en capacité de l'aider. Ce genre de soucis était rarement facile à résoudre, mais elle se devait au moins de tenter sa chance. Rester les bras croisés serait hors de question.

— Il n'y a rien eu de grave! lui assura-t-elle dans un sourire. Enfin, rien d'irréversible, en tout cas.

La Championne n'était pas bien sûre que cette réponse soit très rassurante, mais elle s'en contenterait. Essayer de creuser d'avantage serait très malvenu de sa part, et elle ne voulait pas la gêner d'avantage. Si elle n'avait pas envie de parler de tout cela, elle n'allait pas l'y forcer.

Même si Inoke était une personne qui savait écouter, inciter les gens à parler n'était pas son fort. Elle savait les comprendre, mais aussi les laisser aller à leur rythme. Machinalement, elle remonta légèrement son écharpe. Plus que se protéger du froid, auquel elle s'était très bien habituée avec sa vie en montagne, c'était devenu un geste qu'elle faisait instinctivement, lorsqu'une conversation devenait pesante, gênante, ou que, comme là, elle craignait de gêner la personne à qui elle s'adressait.

— J'ai traversé une mauvaise passe, continua-t-elle après une légère hésitation. Je me demandais pourquoi c'est à moi que toutes ces difficultés arrivaient, et j'ai fui. Je suis retournée à Sinnoh, mais ça ne me rendait pas heureuse. Tout ce que j'avais laissé ici me manquait, et j'ai fini par trouver le courage de revenir.

Bien que la Dresseuse aux fées regardait elle aussi les Pokémons s'amuser, elle écoutait d'une oreille attentive, et esquissa un sourire mélancolique en l'entendant évoquer avoir eu le courage de revenir. C'était un sentiment qu'elle avait entendu un bon nombre de fois, lorsque des voyageurs et des Dresseurs lui racontaient leurs périples, surtout les habitants de cette île. Elle-même avait connu cette sensation, l'envie de tout abandonner, avant de retrouver la flamme.

C'était presque une étape obligatoire, telle qu'elle pouvait la ressentir. Mais chacun la vivait de différentes façons, et dans des circonstances différentes, et celles de Maya semblaient plus importantes que beaucoup, pour l'avoir ainsi forcée à partir dans une autre région.

— Mais ma situation ne s'était pas arrangée par magie. Je pense même qu'elle a empiré, mais au moins j'estime pouvoir me battre à égalité contre mes problèmes.

Inoke arqua un sourcil, se posant des questions sur lesdits problèmes, alors que son regard était revenu vers son interlocutrice. Elle semblait tout aussi surprise d'avoir évoqué cela d'ailleurs, et enchaîna rapidement:

— Oh, mais! Il n'y a rien de grave à cela! En tant que membre du STERN, j'ai de bons avantages! Et combattre en me testant contre les différents champions me permet de me détendre! Il n'y a que dans les jours où je n'ai rien à faire que je deviens mélancolique, et que je repense trop à mes problèmes.

Devant ces justifications précipitées, elle ne put s'empêcher de sourire. Non pas qu'elle se moquait, mais elle semblait ravie encore une fois de constater qu'on pouvait toujours aussi facilement se confier à elle. Son nouveau statut, même si cette jeune femme ne le connaissait pas encore, n'y changeait rien.

— Il y a pas de mal à être mélancolique de temps en temps, lui assura-t-elle. Ça fait même du bien, parfois.

Elle avait dit être du STERN, et également affronter les Champions pour tester ses propres capacités. Cette dernière information était bien sûr celle qui avait capté son attention.

— Alors, vous faîtes aussi le tour des arènes? C'est vrai que c'est une bonne idée pour se tester, et un excellent moyen de s'entraîner. Si vous voulez combattre vos problèmes sur un pied d'égalité, c'est une bonne première étape.

Son regard se fit ensuite plus inquiet, avant qu'elle ne poursuive:

— J'espère juste que vous arriverez à éviter les ennuis d'ici là. Même si ça doit pas être facile, en tant que soldat du STERN.

Si elle devait être honnête, elle ne savait pas grand chose sur cette organisation, si ce n'était qu'ils avaient été formés pour aider la Ligue à affronter les menaces sur l'île. Cela faisait d'elles des alliées, n'est-ce pas? Le raccourci était peut-être facile, mais Inoke voulait croire que cette jeune milicienne était pleine de bonnes intentions.

Se rendant alors compte que le sujet commençait à devenir pesant, elle décida de faire dévier le sujet à nouveau. Elle descendit sa grosse écharpe pour de nouveau mieux montrer son visage, et lui adressa un sourire chaleureux.

— En tout cas, on sera amenées à se recroiser. Enfin, si le badge de l'arène Fée vous intéresse, conclut-elle sans vraiment se rappeler qu'elle n'avait pas encore annoncé son titre.

Une Championne toute nouvelle, elle avait l'avantage que personne ne la connaissait, et donc ne venait l'aborder... mais ça impliquait de devoir toujours se présenter quand c'était nécessaire, et Inoke avait horreur de ça.

Elle semblait prête à accepter les inconvénients qu'impliquait le fait de travailler au STERN. La Championne pouvait bien comprendre, après tout, elle avait fait le même choix en signant son contrat avec la Ligue. Même si cela lui permettait de vivre plus encore son rêve, elle avait été rapidement consciente que cela ferait d'elle une cible potentielle, que ça l'impliquerait à coup sûr dans le conflit direct avec Abyss.

Elle avait choisi son camp, ce jour là, et choisi d'enfin utiliser ses compétences au service de l'île et ses habitants. Trop longtemps elle avait vu défiler les catastrophes, les attaques, sans avoir la force d'agir. Cette proposition d'intégrer les Champions de Maïlys lui avait semblé comme une aubaine, une main tendue pour elle aussi apporter sa pierre à l'édifice.

— Vous... vous travaillez à l'arène? demanda-t-elle, avant de finalement comme sursauter, s'apercevant de ce qu'elle avait raté jusqu'alors. Non... vous êtes la Championne?! L'arène Fée est donc un café de combat..? J'ai encore plus envie de le visiter, maintenant! Affrontez-moi! Enfin... s'il-vous-plaît, réservez moi un moment! Je veux dire... je viendrais à l'arène et je demanderai à vous combattre.

C'était beaucoup de mots, et beaucoup d'engouement, qui eurent l'effet immédiat de surprendre la pauvre Inoke, qui semblait s'être recroquevillée dans son écharpe comme une tortue, gênée par tant d'attention.

— Je... oui. Enfin, avec plaisir, mon arène est là pour ça.

Elle ne savait plus trop quoi dire, alors que les Pokémons de cette Dresseuse semblaient à leur tour plein d'enthousiasme, avec une certaine hâte de s'attaquer à un nouveau badge. Se prenant au jeu, Kai s'amusa à essayer de faire peur à ses nouveaux camarades de jeu, les défiant sur un ton de plaisanterie.

— Non, attendez! On n'est pas ici pour ça, vous vous souvenez? Et puis, vous croyez vraiment que c'est le bon endroit pour un combat d'arène, en pleine rue?

Finalement, la situation était plutôt amusante, et Inoke se mit à glousser devant ce spectacle. La pauvre Maya s'était laissée emportée par son entrain, et ses Pokémons s'étaient laissés embarqués par leur Dresseuse. Dans un sens, cela montrait déjà les liens forts qui les unissaient, c'était une rencontre qui promettait bien des choses.

— Enfin, je ne pense pas que ce sera pour tout de suite, ajouta la Dresseuse alors qu'elle se tournait de nouveau vers la Championne. Je n'ai que récemment obtenu mon deuxième badge, je ne pense pas encore être au niveau, ou en tout cas avoir fait suffisamment de progrès pour continuer. Je suis encore loin de m'y connaître parfaitement en combat!

Cette maladresse, tant dans ses émotions que dans ses paroles, eurent le don de détendre à nouveau la Dresseuse aux fées, qui avait des yeux rieurs et un grand sourire aux lèvres.

— Je serais ravie de vous accueillir, tes Pokémons et toi, commença-t-elle, sans se rendre compte qu'elle s'était calmée au point de la tutoyer comme un automatisme, comme elle le faisait avec chacun de ses challengers. Félicitation pour tes deux badges, en tout cas. J'ai hâte de voir ce que va donner notre combat. Tu sais quoi? Vous aurez même droit à une petite pâtisserie en cadeau de bienvenue.

Elle aussi, se laissait peut-être un peu trop emporter par l'enthousiasme. Il fallait que que c'était bien la première fois qu'elle rencontrait, en dehors de son café, une Dresseuse qui avait aussi hâte de fouler le pied de son arène. Elle venait de prendre son poste, et chaque combat, ou promesse de combat, l'animait d'une nouvelle flamme et d'une envie de prouver sa valeur.

— Enfin, même si tu ne te sens pas prête, ajouta-t-elle pour modérer ses ardeurs, tu seras quand même la bienvenue, si tu es de passage à Bordeciel. Il y a aussi beaucoup de Dresseurs qui viennent juste s'entraîner en s'affrontant là-bas, ou qui se donnent des conseils. C'est toujours pratique, quand on a conscience d'avoir encore des choses à apprendre.

La mentor avait lancé cette dernière phrase comme un clin d'œil. Avant même d'être Championne, elle avait eu l'occasion de rencontrer de nombreux Dresseurs persuadés de tout savoir sur les combats. Certains via la théorie, d'autres par de nombreuses victoires qui leur avaient fait pendre la grosse tête. A ceux là, elle aimait leur rappeler que même les plus grands Maîtres avaient encore des choses à apprendre. Elle était toujours ravie de voir des Dresseurs plus humbles, conscients d'avoir encore du chemin à faire.

Bien sûr, il y en avait aussi qui étaient trop humbles, et ce n'était pas une bonne chose non plus. Peut-être était-ce le cas de cette nouvelle rencontre? Elle le découvrirait bien assez tôt.