[Terminé] Un jeu, un sport, un art [ft Timélias]

Sujet: [Terminé] Un jeu, un sport, un art [ft Timélias] Sam 6 Jan 2024 - 18:09

L’Imaginarium était d’ordinaire une ville trop agitée la nuit, bien plus calme le jour. Elle ne restait pas non plus sans activité une fois le matin arrivé, mais tout semblait fonctionner au ralenti comparé à ses périodes nocturnes. Pourtant, un petit coin de la ville aux buildings tout en néons était bien mouvementé alors que le soleil montait doucement dans le ciel.

Un combat amical arrivait à son terme sur un terrain de combat public, et les spectateurs avaient l’air presque plus impliqués dans le match que les quatre concernés. Qu’ils soient à peine sortis de leurs boulots ou loisirs de nuit, ou de rares lève-tôt à la vie surprenamment diurne, les gens du coin disaient rarement non à toujours plus de divertissement, même en chemin.

“Halite, lance ton plus grand Éboulement !”

Deux jeunes femmes se faisaient face. Une possédait un imposant Gigansel, l’autre une petite Pikachu à la fourrure si pâle qu’on aurait pu la prendre pour un fantôme. Il était difficile de voir que le combat était si proche de la fin, le géant de roche ne montrait pas grand chose, impassible, et le petit Pokémon électrique avait l’air toujours plein d’énergie, malgré une fourrure salie et noircie par endroit, malgré les résidues de sel blanc qui lui rongeait doucement la peau. L’adrénaline du point culminant d’un combat.

Le Gigansel envoya un rocher d’une taille conséquente vers une Pikachu minuscule avec une lenteur certaine. Une attaque de grande envergure contre un si petit Pokémon qui ne semblait pas s’en inquiéter pour autant.

“Queue de Fer, fonce !”

Alyx lançait son ordre alors même que Tock n’en avait pas besoin, elles étaient sur la même longueur d’onde. L’albinos profite d’une Hâte précédemment lancée pour s’élancer avec vivacité alors que la roche géante de son adversaire était lancée. Sa queue en éclair se mit à luire et elle bondit droit vers l’Éboulement en tournant si vite sur elle-même qu’elle aurait très bien pu être un disque d’acier blanc. Elle traversa la roche qui fut tranchée à la verticale avec une netteté déconcertante, dont les deux moitiés tombèrent lourdement au sol derrière elle en soulevant un léger nuage de poussière.

“Perd pas ton élan Tock, enchaîne avec Electacle !”

“Ralentis la avec des Lames de Roc sur son chemin, vite !”

Halite le Gigansel n’était peut-être pas le plus rapide des Pokémons à lancer des gros cailloux ou donner des coups dévastateur avec son corps de géant, mais faire simplement surgir des roches tranchantes au sol lui permettrait d’agir un peu plus vite qu’avec n’importe quelle autre capacité.

Profitant d’enchaîner mouvement sur mouvement sans pause et sans s’arrêter, Tock sortit de son tournoiement vertical de véritable disqueuse pour se changer en comète électrique avant même que ses pattes ne touchent le sol, et la voilà reparti à toute vitesse vers sa cible. Pas de changement de plan après le nouvel ordre de leur adversaire, Alyx et sa partenaire arboraient le même sourire confiant.

“On s’arrête pas !” lança-t-elle plus à l’attention des autres que de son propre Pokémon.

Tock avait la tête dure, et elle était têtue. Elle voulait toujours frapper fort, si fort qu’elle ne pouvait pas en ressortir complètement indemne. On ne pouvait pas cogner de toutes ses forces sans se faire un peu mal au poing, après tout. Et tous les dégâts qu’elle prenait, elle savait les renvoyer au centuple.

Alors elle n’arrêta pas sa course et profite de sa vitesse et de sa taille pour éviter les quelques Lames facilement esquivable, les autres, elle les frappait de plein fouet sans jamais perdre sa vélocité, explosant les pointes dont les éclats s’entouraient d’arc électriques en flottant quelques instants avant de retomber. Oh elle la sentait passer, cette attaque, son adversaire frappait fort lui aussi, mais lorsqu’on était née parmi les cristaux les plus purs ce n’était pas quelques morceaux de caillou bas de gamme qui pouvaient effrayer.

Tock frappa de plein fouet le Gigansel qui tituba malgré sa taille, malgré son poids. Une explosion de cristaux salins et d’éclairs bleutés décora le terrain à l’impact, presque trop lumineuse. L'un comme l’autre ne pourraient pas essuyer la prochaine attaque de leur adversaire, le moment de vérité.

“Halite, écrase-là avec Tacle Lourd ! Donne tout !”

“Montre nous ton meilleur pas de danse aérienne, Détection !”

Le colosse de sel avait joint ses mains pour frapper l’albinos en plein vol alors qu’elle retombait après l’impact dans l’espoir d’un coup de plein fouet suivi d'une belle rencontre avec le sol en prime. La frappe frôla Tock qui, de sa Détection, évita agilement les mains du géant, profitant de son poids plume et de sa queue bien assez large pour servir de véritable gouvernail aérien afin manœuvrer dans les airs. Au lieu d’atterrir au sol, elle se percha la tête en bas sur les mains minérals jointes du Gigansel, tenant d’une patte avant et adressant un clin d’oeil au colosse, en bonne frimeuse qu’elle était.

“Termine le avec un Contre”

“Merde… Trépignement !”

Tock avait déjà quitté les mains du Gigansel pour bondir vers sa tête alors qu’une énergie nouvelle parcourait son corps, tous les coups qu’elle avait pris, les contrecoups de ses propres attaques, allaient devenir sa force. Le géant de roche avait commencé à piétiner le sol pour lancer sa propre attaque, mais trop tard, le tout petit poing de l’albinos frappait la tête toute en hauteur du Pokémon adverse, laissant échapper un large éclat d’énergie vermeille au contact bien plus brutal qu’il n’y paraissait.

Le géant tomba au sol et Tock atterrit devant lui, essoufflée. Une brise et elle s’écroulait, elle aussi, à ne pas en douter. Chaque dresseuse vint féliciter son Pokémon avant de se serrer la main devant un public presque triste que le combat soit déjà terminé. Après un bref échange, les deux dresseuses se saluèrent et le public commença à se disperser. Trop pris par le combat, la plupart se retrouvèrent surpris à nouveau de voir un bien trop grand Léviator enroulé dans la fontaine derrière eux pour profiter d’un bon rafraichissement reposant.

Alyx et Tock rejoignirent le simili-dragon tranquillement installé tandis que les encore récemment spectateurs contournaient presque trop largement la fontaine occupée par la créature géante somnolente. Alyx n’avait pas le coeur à rappeler Galimatias alors qu’elle semblait étonnamment sereine, elle lui laisserait profiter encore un peu de ce moment de calme, et de la fontaine publique qu’elle avait fait sienne pour quelques temps. Alors elle se contenta d’une main sur ses écailles à travers l’eau ruisselante pour lui signaler son retour.

Tock, elle, essayait de nettoyer sa fourrure mais se ravisa bien vite après un seul coup de langue, son pelage était devenu du pur sel. Elle grimpa bien vite sur sa trop grande amie à la recherche d’un filet d’eau pour se rincer.

Timélias s'étira en marchant, pieds nus, dans les rues de l'Imaginarium à l'aube. Il venait de passer une nuit dans un petit hôtel premier prix, si tant est qu'il existait des hôtels “premier prix” dans cette ville du luxe, du loisir et des joies nocturnes. Malgré le prix spécial obtenu la veille, Timélias ne comptait pas se mettre à dépenser son argent n'importe comment, lui qui était né dans la pauvreté.

Il réajusta le petit ruban en bas de la tête de Snotigol, celui qui symbolisait ce prix spécial obtenu au Concours de Coordination tenu la veille au soir. Le sien était partiellement dissimulé sous le corps de Jananda, lové sur ses épaules comme à son habitude. Avant de se coucher, Snotigol avait eu droit à mille câlins de félicitations. Timélias n'était officiellement pas le vainqueur du concours, mais dans sa tête, c'était déjà une victoire. Il savait très bien que les Tadmorvs répugnaient la plupart des gens, que ce soit à la vue ou à l'odeur, et il était profondément fier d'avoir réussi à montrer un Tadmorv sous un autre aspect, loin de celui d'un Pokémon dégueu. Snotigol avait réalisé sa performance au-delà des attentes de Timélias, grâce à un entraînement intensif au fil des semaines précédant le concours, et avait obtenu un prix du jury.

Dans la rue, Timélias marchait comme sur un nuage, si on négligeait son ventre encore alourdi du repas de la veille. Oui, il avait certes choisi un hôtel parmi les moins chers de la ville, mais il avait offert à ses six amis un repas gargantuesque au restaurant histoire de fêter l'évènement. C'était exceptionnel, et son estomac n'était pas habitué à accueillir autant de nourriture en un repas. Snotigol, lui, semblait s'en être remis beaucoup plus vite.

TIMÉLIAS – En tout cas, ce matin, je n'ai pas faim tout de suite...

Snotigol poussa un petit cri amusé, puis tourna la tête en même temps que le jeune Dresseur, alors que les bruits de ce qui ressemblait à un combat pokémon leur parvenaient.

TIMÉLIAS – Tiens, un combat dans la rue de si bonne heure ? Cette ville ne se repose jamais... On va voir, Snotty ?

Le Tadmorv répondit un hochement de tête enthousiaste, tandis que Jananda, après un bâillement, cala son museau entre le cou de Timélias et ses propres anneaux, obtenant au passage quelques gratouilles qu'il n'avait même pas réclamées. L'Abo était lui aussi toujours sur la digestion de la veille.

Le soleil montait juste dans le ciel et commençait à se substituer par sa lumière aux multiples néons des bâtiments bordant la place sur laquelle étaient dessinées les limites d'un terrain de combat. Tous trois arrivaient malheureusement un peu tard, le combat touchait à sa fin. Une Pikachu malmenait un Gigansel en se jouant de la lenteur du colosse. La Dresseuse du Gigansel perdit de son assurance en devinant que son puissant golem était sur le point d'être vaincu par la vive Pikachu. Le colosse de sel s'effondra finalement. Les deux adversaires se serrèrent toutefois la main en bonne sportivité.

C'est là que Timélias reconnut la Dresseuse de la Pikachu : il s'agissait d'une fille qui avait gagné le premier Concours de Coordination auquel Timélias avait participé en se faisant finalement éliminer pour non-respect des règles, une honte qu'il avait eu du mal à oublier jusqu'à ce que le résultat de la performance de Snotigol à l'itération de la veille effaçât tout cela. Si cette fille n'avait pas également participé au concours de la veille, sans victoire cette fois-ci, Timélias aurait sans doute oublié son nom. Elle s'appelait Alyx et sa Pikachu avait justement réalisé la prestation, en duo avec une Floréclat.

Le dernier combat pokémon que Timélias avait mené, restait celui pour le badge de type Plante à l'arène de Violeta. Un mauvais souvenir malgré la victoire. Il venait d'observer la Dresseuse du Gigansel garder son sang-froid en voyant pourtant son Pokémon être dominé et ne pouvait s'empêcher de faire la comparaison avec la manière dont lui-même stressait à chaque fois qu'il voyait ses amis combattre. Il avait presque eu les larmes aux yeux quand Jananda avait été mis K.O. sous ses yeux, alors que là, la Dresseuse du Gigansel gardait le sourire et s'en allait tout de suite soigner son Pokémon dans un Centre comme si tout cela était la routine.
Car pour un Dresseur Pokémon, c'était en effet la routine.

Alyx, quant à elle, s'arrêtait à une fontaine où l'attendait une autre de ses Pokémons, et pas n'importe laquelle : une Léviator, rien que ça ! L'attention de Timélias avait tout de suite été captée par le combat et avait manqué cette Léviator lovée autour de la fontaine comme Jananda l'était autour de son cou. La Dresseuse du Gigansel avait déjà disparu dans la foule et Timélias ne se sentait pas de l'embêter alors qu'elle voulait d'abord faire soigner son Pokémon. Alyx, il l'avait déjà croisée deux fois, même s'ils ne s'étaient pas encore adressé la parole, et elle semblait plus disponible.

Timélias s'approcha un peu timidement. Voyant que son ami n'allait pas savoir comment entamer la conversation, Snotigol prit les devants, malgré sa lenteur naturelle à se déplacer. Avec son petit ruban du Concours de Coordination, le Tadmorv vint saluer poliment et avec un grand sourire les trois personnes. Timélias soupira, à la fois amusé et attendri par son ami qui venait d'engager la conversation pour lui.

TIMÉLIAS – Salut, Alyx !... On s'est croisés aux deux derniers Concours de Coordination. Je suis Timélias. D'ailleurs bravo pour ta victoire de l'autre fois ! (à la Pikachu) Et bravo à toi pour le combat ! Même si je ne suis arrivé qu'à la fin.

Il ne put s'empêcher de regarder aussi l'imposante Léviator paisiblement assoupie autour de la fontaine.

TIMÉLIAS – Dis donc, que t'es belle, toi !

Alyx observait Tock se nettoyer la fourrure comme elle pouvait avec amusement, calée sous un jet d’eau sur le long corps de Galimatias. Elle aperçut du mouvement du coin de l'œil et vit un Tadmorv bien amical approcher et la saluer par la même occasion, à laquelle elle répondit d’un sourire et d’un geste elle aussi. Non loin derrière se tenait son dresseur, et tous deux arboraient fièrement leurs petits rubans respectifs du concours de la veille.

C’était ce gamin débraillé qu’elle avait croisé à deux reprises, aux deux concours récents. Ils ne s’étaient qu’aperçus sans jamais vraiment s’adresser la parole jusqu’alors. Le Tadmorv n’était pas son seul Pokémon de sortie puisqu’il avait les épaules décorées d’un Abo confortablement installé. Si ce garçon filiforme avait l’air de pouvoir être soufflé par une simple brise, il ne manquait pas d’un peu de force et de musculature pour balader son ami rampant tout en muscles qui devait bien peser son poids autour de son cou. Il ne fallait pas se fier à un livre de part sa couverture et elle était bien placée pour le savoir.

“Salut, Alyx !... On s'est croisés aux deux derniers Concours de Coordination. Je suis Timélias. D'ailleurs bravo pour ta victoire de l'autre fois !” Il prit ensuite le temps de s’adresser à une Tock qui n’entendrait qu’à moitié ses paroles, l’eau lui couvrant les oreilles par moment “Et bravo à toi pour le combat ! Même si je ne suis arrivé qu'à la fin”

Entendre qu’à moitié mais entendre l’essentiel néanmoins. La Pikachu bomba fièrement le torse avec un sourire satisfait avant de manquer de boire la tasse en ne faisant plus attention à l’eau qui lui tombait sur la tête. Il était temps de se sécher, alors elle s’éloigna du jet qui lui servait de douche improvisée pour s’ébrouer sommairement et finir avec une fourrure bien hirsute. D’un bon, elle rejoignit sa dresseuse qui avait tendu un bras pour l’accueillir et bien vite elle avait retrouvé sa place habituelle.

“Dis donc, que t'es belle, toi !”

Cette fois, il s’adressait à Galimatias. La Léviator bien trop grande ouvrit un œil à moitié pour observer le petit être qui s’adressait à elle et se contenta de souffler des naseaux comme seule réponse.

“Elle apprécie le compliment !” interpréta Alyx alors qu’elle offrait une baie revigorante à Tock.

Le terrible simili-dragon n’avait pas l’air du genre à porter une quelconque importance à ce que les autres pensaient d’elle, encore moins s’il s’agissait d’être humain. Pourtant, sa nouvelle dresseuse voyait en elle une certaine sensibilité, cachée sous toute cette épaisse couche d’écailles solides, cachée derrière ses grands airs de créature terrifiante.

“Bravo à vous deux pour votre victoire d’hier” félicita-t-elle à son tour. Une petite victoire restait une victoire quand même “Vous avez l’air d’avoir un peu plus d’expérience, tes Pokémons et toi”

Il y avait des choses qui sautaient aux yeux quand on commençait à avoir l’habitude. Si elle n’avait jamais eu ni l’envie ni le besoin de défier des Champions pour leurs jolies petits badges, ici ou ailleurs, elle avait son propre lot d'expériences en tout genre. Les nombreux combats amicaux contre des personnes et des Pokémons de tous horizons, Challengers en quête d’entraînement contre tout le monde et n’importe qui ou simple dresseur en recherche de matchs décontractés, d’autres situations beaucoup plus sérieuses, les jours et les jours passés en pleine nature à observer et côtoyer des Pokémons sauvages. Ça forgeait le regard. Et puis parfois ça avait été une question de survie.

“Alors, tu comptes faire carrière dans la Coordination ou c’est plutôt un truc sur le côté ?”

Se professionnaliser à Maïlys étaient sans aucun doute la pire idée qui soit aux vues de l’aspect bien trop aléatoire de ses événements avec des concours qui peinaient à être réguliers pour disparaître des mois durant, mais les autres régions existaient et n’étaient qu’à portée d’avion et de bâteau après tout.

L'imposante Léviator répondit simplement par un souffle des narines, un œil à moitié ouvert, ce qui pouvait ressembler à un « qu'est-ce que tu me veux, toi, fous-moi la paix et laisse-moi pioncer ». Timélias fut un poil brusqué mais sourit quand Alyx lui apporta une toute autre traduction selon laquelle elle appréciait le compliment. Timélias n'était pas convaincu mais il ne connaissait pas cette Léviator, et Alyx était la mieux placée pour décrypter ses humeurs.

La Pikachu, quant à elle, venait de grimper sur le bras d'Alyx, mettant fin à sa petite douche après avoir un instant bu la tasse, ce qui avait spontanément fait rire Snotigol sans méchanceté. La Pikachu avait les poils qui martaient dans tous les sens et Timélias avait juste envie de la caresser pour les remettre un peu en ordre, mais bien entendu il ne se permit pas de le faire. Et puis la Pikachu était rigolote avec ses poils mouillés décoiffés.

Alyx félicita Timélias et Snotigol pour leur « victoire », ce que Timélias ne prit pas la peine de corriger, car bien qu'ils n'eussent pas techniquement obtenu la victoire au Concours, le prix spécial du jury restait une victoire personnelle, et c'est sans doute en ce sens qu'Alyx employait ce mot.

ALYX – Vous avez l'air d'avoir un peu plus d'expérience, tes Pokémons et toi.

Sur le moment, Timélias se demanda si Alyx voulait dire qu'ils avaient plus d'expérience que la Dresseuse du Gigansel, ou s'ils avaient gagné en expérience depuis leur première participation à un Concours de Coordination. Il supposa plutôt qu'il s'agissait de la deuxième signification, et il sourit à ses deux amis présents, gratouillant à nouveau Jananda sous le museau au passage. L'Abo ne venait pourtant que très peu quémander des papouilles mais ne se plaignait jamais d'en recevoir pour autant ; il les appréciait comme les autres, et ce n'est pas parce qu'il n'en réclamait pas, qu'il ne devait pas y avoir droit. De toute manière, Timélias aimait papouiller ses amis Pokémons en toutes circonstances, et il savait qu'en particulier Temiel, Luglii ou Snotigol, étaient particulièrement friands de cela. Même Stanzec avait une bouille adorable à ses yeux, alors qu'objectivement, ce n'était qu'une sphère métallique bicolore, mais Timélias le chérissait déjà beaucoup et aimait le serrer dans ses bras... et là encore Stanzec ne s'en plaignait pas même si la plupart du temps il ne demandait rien.

ALYX – Alors, tu comptes faire carrière dans la Coordination ou c'est plutôt un truc sur le côté ?
TIMÉLIAS – Ouh là !

Timélias manqua s'étouffer. Faire carrière dans la Coordination ?! Il lui faudrait une sacrée évolution psychologique et beaucoup d'autres rubans pour un jour s'imaginer qu'il avait le talent requis et avoir la prétention d'enchaîner les Concours.

TIMÉLIAS – Non, là c'était surtout pour faire plaisir à Snotty et pour le mettre en avant. J'ai beau avoir choisi d'être Dresseur, certains de mes amis aiment faire autre chose que des combats. Et puis j'ai grandi avec lui en entendant les gens dire plein de choses méchantes sur les Tadmorvs, je crois que ça m'a un peu permis... de lui rendre justice. Hein mon gros n'amour !

Le jeune Dresseur pieds nus s'accroupit un instant pour serrer son gluant ami d'enfance contre lui, puis se releva. Machinalement il posa une main sur un anneau du corps de Jananda pour l'aider à se maintenir en place, et être sûr de ne pas trop le secouer en bougeant.

TIMÉLIAS – Bon, cela dit, je dois bien avouer que la Coordination ça reste quand même beaucoup moins éprouvant mentalement que les combats ! En tout cas pour moi...

“Ouh là !”

Une telle surprise de la part de Timélias donnait l’impression qu’Alyx avait dit la chose la plus absurde qui soit, et l’absurde, elle connaissait ça plutôt bien, des trucs absurdes, elle en avait déjà dit des tas, des bien plus étranges que… quoi que cette réaction suggérait.

“Non, là c'était surtout pour faire plaisir à Snotty et pour le mettre en avant. J'ai beau avoir choisi d'être Dresseur, certains de mes amis aiment faire autre chose que des combats. Et puis j'ai grandi avec lui en entendant les gens dire plein de choses méchantes sur les Tadmorvs, je crois que ça m'a un peu permis... de lui rendre justice. Hein mon gros n'amour !”

Alyx avait l’impression de manquer quelques informations et sa confusion n’était pas totalement levée quant à la réaction initiale du dresseur débraillé. Il n’y avait peut-être rien à comprendre. Mais la volonté de faire plaisir à ses compagnons en s’adaptant à leurs intérêts faisait écho à sa façon d’évoluer dans la vie de tous les jours avec ses propres amies de poche, ils semblaient avoir ce point commun.

Si les Concours l’intéressaient dans tous les cas, la première pensée d’Alyx avait été d’en parler à Little avant tout autre chose en sachant pertinemment que la Raichu allait être aux anges, et ce malgré ses appréhensions de souris peureuse.

Au moins, ce Tadmorv avait su briller et son dresseur avait su l’y aider et l’accompagner. Triste histoire que d’entendre cette anecdote d’enfance, ils en étaient sans doute ressortis grandis tous les deux. La méchanceté des gamins envers leurs pairs n'avait aucune limite et les adultes semblaient toujours dans l’incapacité de le voir. Comme si un regard juvénile était le seul à pouvoir en être témoin, et que les harcèlements entre gosses étaient dans un tout autre monde auquel ces adultes n’avaient jamais accès. Et il était malheureux qu’une alors bien jeune Alyx en soit venu à la conclusion que les moqueries et les insultes des autres enfants recelaient trop souvent de bien tristes vérités.

“Bon, cela dit, je dois bien avouer que la Coordination ça reste quand même beaucoup moins éprouvant mentalement que les combats ! En tout cas pour moi…”

Nouvelle confusion chez Alyx qui ne put s’empêcher de lever un sourcil interrogateur. De plus en plus curieux. Enfin, il n’était pas difficile de voir que le jeune homme transpirait le manque de confiance, mais au-delà de ça…

“Pourquoi ça ? C’est la même chose” dit-elle sans attendre ni réfléchir, comme s’il s’agissait d’une évidence “C’est ni plus ni moins qu’une chorégraphie, plus improvisée, avec d’autres partenaires, un autre dresseur et ses Pokémons” Tock se manifesta alors qu’elle finissait son en-cas revigorant, comme pour faire une remarque à sa dresseuse “Certes, il faut un peu plus de concentration mais quand même”

A mesure qu'il parlait, Timélias voyait bien l'incompréhension se dessiner de plus en plus sur le visage d'Alyx, comme si ce qu'il disait ne faisait pas de sens pour son interlocutrice. Déjà, sa réaction étranglée quand elle lui avait demandé s'il comptait faire carrière dans la coordination ; puis quand il exprimait son envie de mettre en avant son ami Tadmorv ; quand il expliquait que ce concours était une façon de rendre justice à ce même ami Tadmorv après tout ce qu'il avait pu entendre de méchant sur son espèce pokémon ; et enfin quand il avoua que la coordination restait beaucoup moins éprouvante mentalement pour lui que les combats.

A ces derniers mots, Alyx eut une réaction spontanée :

ALYX – Pourquoi ça ? C’est la même chose !

Ce fut au tour de Timélias d'arquer un sourcil d'un air perplexe. Ce fut sorti si naturellement de la bouche d'Alyx que cela paraissait la plus grosse des évidences pour la fille aux cheveux bleu nuit assortis à ses yeux plus clairs et plus irisés.

Le combat et la coordination, la même chose ?! Dans quel monde ?

ALYX – C’est ni plus ni moins qu’une chorégraphie, plus improvisée, avec d’autres partenaires, un autre Dresseur et ses Pokémons.

Timélias eut du mal à voir où elle voulait en venir. Déjà, sa phrase lui sonnait paradoxale : une chorégraphie improvisée ?! Un combat n'avait rien d'une chorégraphie, c'était une confrontation où chacun devait s'adapter aux gestes et aux spécificités de l'adversaire. En coordination, les capacités du Pokémon étaient exécutées à des fins artistiques ; en combat, elles l'étaient à des fins de sape des ressources adverses, jusqu'à ce que l'adversaire n'ait plus l'énergie de poursuivre le combat et tombe K.O.. Cela n'avait donc rien à voir !

Même la Pikachu sembla corriger un peu les propos de sa Dresseuse qui pour autant ne changea pas complètement de discours. Un combat, selon elle, était chorégraphié tout comme une prestation de coordination avec juste plus d'improvisation et plus de concentration. Pour Timélias, ce n'était pas juste une petite différence ! Il fallait s'adapter à l'adversaire, quand une chorégraphie de coordination n'était perturbée par aucun élément extérieur. Et la concentration n'était pas du tout la même. Timélias ne ressentait pas du tout les mêmes émotions quand il pensait à l'éventualité que Snotigol fasse un faux pas dans sa chorégraphie, et quand il le voyait recevoir des coups et crier de douleur.

TIMÉLIAS – Bah disons déjà que dans une chorégraphie de coordination, je ne risque pas de voir mon ami se faire mettre K.O. !

Timélias manquait certes de confiance en lui – pas en ses amis Pokémons – mais ce n'était clairement pas ça qui l'avait mis dans tous ses états pendant son match d'arène contre Violeta. La compétition avait beau stimuler son sentiment d'infériorité et d'insuffisance, il avait très bien vécu le concours de coordination, alors qu'il avait quand même été mis en compétition face à d'autres prestations scéniques, d'autres Dresseurs et leurs Pokémons. La première différence, donc, entre le combat et la coordination, c'est que l'un entraîne blessures et douleur physique, pas l'autre.

TIMÉLIAS – En fait c'est éprouvant pour moi de trop m'investir émotionnellement dans un combat, alors que m'investir émotionnellement dans un chorégraphie de coordination, ça pose aucun problème. Là, tu vois, à la place de ton adversaire, j'aurais été crispé de voir mon Gigansel se faire prendre de vitesse et malmener par Pikachu jusqu'à s'écrouler au sol.

“Bah disons déjà que dans une chorégraphie de coordination, je ne risque pas de voir mon ami se faire mettre K.O. !”

...Hein ?

“En fait c'est éprouvant pour moi de trop m'investir émotionnellement dans un combat, alors que m'investir émotionnellement dans un chorégraphie de coordination, ça pose aucun problème. Là, tu vois, à la place de ton adversaire, j'aurais été crispé de voir mon Gigansel se faire prendre de vitesse et malmener par Pikachu jusqu'à s'écrouler au sol”

La confusion d’Alyx n’allait pas en s’arrangeant au fil des explications de son interlocuteur. Elle commençait à se demander si, à force d’aller et venir dans la grotte trop étrange du Cratère, elle n’en était pas ressortie dans un monde parallèle.

Ou alors ce type avait de sérieux soucis dans sa tête. Ironique.

“Attends, attends, pause” finit-elle par dire en essayant de mettre de l’ordre dans ses pensées “On dirait presque que tu parles de combat à mort là, pas de match Pokémon”

Il y avait une distinction très claire entre les combats de la vie de tous les jours, cette culture si ancrée dans les intéractions humaines et Pokémon partout dans le monde, et les situations de réel danger. C’en était presque devenue… non, ça avait toujours été une forme de communication et d’expression, depuis si longtemps qu’il était difficile de se rendre compte que les choses avaient pu être différentes, à une époque où les humains et Pokémons vivaient bien moins en harmonie.

Face au danger, dans une situation de vie ou de mort, le fair-play n’était plus. Tous les coups étaient permis. Plus question de beaux combats nobles et impressionnants. Frapper pour faire mal, frapper pour blesser.

Alyx ne connaissait que trop bien les deux situations.

“Encaisser les coups et tomber d’épuisement ça fait partie du jeu, tout le monde le sait, c’est rien de grave et c’est certainement pas la fin du monde”

Tock manifesta son approbation, en tant que professionnelle à savoir encaisser les coups. Et puis, si elle avait semblé malmener son adversaire, lui aussi lui avait mis de sacré dégât, elle n’avait jamais vraiment l’air de se fatiguer avec sa personnalité obstinée, et puis elle et sa dresseuse avait simplement dû accélérer les choses pour éviter que le sel accroché à sa fourrure ne grignote trop son énergie. Et pour ça, elles avaient imposé leur rythme en tapant vite et fort.

“C’est un sport de combat comme y en a des tas d’autres ! Regarde les arts martiaux. Des mouvements qui, seuls, allient grâce, agilité, et force, seul ou en groupe, comme une chorégraphie. Mais il y a aussi des techniques pour s’opposer à un adversaire dans un combat qui ressemblera presque à une danse, où chacun doit savoir prendre des coups, ça peut faire mal, ça fatigue, mais personne ne sera jamais vraiment blessé” expliqua-t-elle pour préciser sa pensée “Enfin, à moins d’un accident, ça arrive” ajouta-t-elle en haussant les épaules.

ALYX – Attends, attends, pause.

Timélias eut une mine déconfite, Alyx lui donnant l'impression qu'il venait de débiter un flot de bêtises sans queue ni tête. Il se sentit un peu bête sans même trop savoir pourquoi. Néanmoins, il accorda toute son attention à ce qu'Alyx s'apprêtait à dire. A la limite, si elle pouvait lui expliquer comment voir les combats de sorte à mieux gérer ses émotions, alors cela pourrait fortement l'aider, en complément de ce qui était ressorti de sa conversation avec Amelle, à ne pas reproduire la même chose que lors de son combat d'arène contre Violeta.

ALYX – On dirait presque que tu parles de combat à mort là, pas de match pokémon.

C'était un peu sévère, et exagéré, mais ça valait la peine d'être écouté. Timélias ne répondit pas tout de suite ; au contraire, il afficha une mine attentive, et son regard exprimait « Vas-y, développe. ».

ALYX – Encaisser les coups et tomber d'épuisement ça fait partie du jeu, tout le monde le sait, c'est rien de grave et c'est certainement pas la fin du monde.

Cette phrase entra en résonnance avec quelque chose qu'avait dit Amelle : les Pokémons connaissaient leurs limites et il restait peu probable qu'ils se blessent au-delà de ce qu'ils pouvaient endurer, d'autant que la Ligue avait des règles. Les Pokémons savaient que les combats les amenaient à encaisser des coups jusqu'à tomber dépuisement, comme le disait Alyx. Il suffisait donc juste de leur faire confiance. Et puis, ce n'est pas comme si Timélias forçait ses Pokémons à se battre alors qu'ils n'en avaient pas envie... Même Temiel, le plus câlin de ses amis, n'avait pas hésité face à Violeta à encaisser des coups pour offrir la victoire au jeune Dresseur pieds nus.

ALYX – C'est un sport de combat comme y en a des tas d'autres ! Regarde les arts martiaux. Des mouvements qui, seuls, allient grâce, agilité, et force, seul ou en groupe, comme une chorégraphie. Mais il y a aussi des techniques pour s'opposer à un adversaire dans un combat qui ressemblera presque à une danse, où chacun doit savoir prendre des coups, ça peut faire mal, ça fatigue, mais personne ne sera jamais vraiment blessé. Enfin, à moins d'un accident, ça arrive.
TIMÉLIAS – Ah, donc toi aussi tu vois le combat comme un sport...

Alyx ne risquait pas de pouvoir comprendre où Timélias voulait en venir avec cette remarque. Quand il avait discuté avec Amelle, Timélias avait expliqué qu'il voyait les Dresseurs comme des sportifs enchaînant les compétitions pour obtenir des trophées, en l'occurrence des badges d'arène. Or il ne se sentait justement pas l'esprit compétiteur. Joueur, sûrement, mais pas compétiteur. En tant que Dresseur, il voulait que ses Pokémons puissent s'épanouir, y compris à travers le combat s'ils pouvaient y trouver quelque chose de ludique. Seulement voilà, un combat d'arène, ce n'était plus “pour le jeu”, cela prenait tout de suite une autre dimension, plus sérieuse, celle d'une compétition plus formelle où les Pokémons ne se battaient pas juste pour le plaisir. Du moins, ça, c'était ainsi qu'il voyait les choses jusqu'à sa conversation avec Amelle.

Et voilà qu'Alyx employait à nouveau la comparaison avec les sportifs. D'où la remarque de Timélias. Il essaya de formaliser une question qui l'aiderait à y voir plus clair :

TIMÉLIAS – Si les combats pokémons sont un sport, est-ce que ça implique forcément que tous les Dresseurs sont en compétition ? Est-ce que pour toi les badges d'arène sont des trophées ? Et qu'est-ce que tu penses d'un Dresseur qui viendrait à perdre un combat d'arène ?

Cela faisait trois questions assez distinctes mais toutes importantes, Timélias voulait vraiment avoir l'avis d'Alyx là-dessus, pour voir s'il pouvait concilier sport et détente.

TIMÉLIAS – Ce qui me gêne aussi c'est de prendre le risque que Snotty et mes autres amis se fassent humilier en combat. Je veux pas qu'on puisse penser qu'ils sont nuls parce que je n'ai pas su les coacher comme il faut.

“Ah, donc toi aussi tu vois le combat comme un sport…”

Alyx commençait à se dire qu’elle devait prendre des notes sur cet univers parallèle avant qu’elle ne se mette à tout mélanger comme ça avait pu lui arrivé par le passé. Quoique… non ce gamin était bien là avant. Ou alors ce n’était pas les mêmes. Deux versions du même ? Ça se discutait.

“Si les combats pokémons sont un sport, est-ce que ça implique forcément que tous les Dresseurs sont en compétition ? Est-ce que pour toi les badges d'arène sont des trophées ? Et qu'est-ce que tu penses d'un Dresseur qui viendrait à perdre un combat d'arène ?”

Elle sentait le sombre augure d’un mal de crâne qui se profilait à l’horizon. Il serait trop malvenu de sa part de demander à ce type s’il sortait tout droit d’une grotte mais ça serait mentir de dire que la question ne lui avait pas traversé l’esprit. Mais le monde était vaste et tout le monde était attiré par Maïlys, peut-être existait-il un endroit où les combats Pokémons et les compétitions de la Ligue étaient méconnues… non ?

“Nop, yep, meh rien de spécial” répondit-elle brièvement en grimpant en équilibre sur le rebord de la fontaine entre deux morceaux de Galimatias qui en dépassaient “On peut faire du sport pour se détendre, on peut faire du sport pour s’amuser seul ou avec les autres, on peut faire du sport pour la compétition, on peut faire du sport pour se fixer des objectifs et être satisfait quand on les a accompli, on peut faire du sport pour en faire son métier. Pourquoi ça serait différent avec les matchs Pokémon ?”

Elle termina sa balade près de la grande tête de la Léviator pour nonchalamment s’appuyer épaule contre elle, bras croisés. Le Pokémon dominant laissa échapper un bref grondement sourd au contact sans davantage de réaction.

“Ce qui me gêne aussi c'est de prendre le risque que Snotty et mes autres amis se fassent humilier en combat. Je veux pas qu'on puisse penser qu'ils sont nuls parce que je n'ai pas su les coacher comme il faut.”

Ah, le problème est là.

“Oh t’en fais pas pour ça, c’est un effort collectif. Au pire des cas, les plus mauvais joueurs penseront que vous êtes tous nuls sans distinction ! Certains vont blâmer les Pokémons mais la plupart vont plutôt blâmer leur Dresseur. Alors, au final c’est toi qui a le plus de chance de te faire humilier, vraiment”

Il n’y avait rien de plus ennuyeux que ce genre de personne. Si seulement les experts du d’un certain Type étaient les seuls à pouvoir être toxique. Les rabats-joies qui ne combattaient que pour écraser les autres n’avaient rien d’amusant. Enfin, leur faire goûter un peu de leur propre poison était la seule chose satisfaisante. Autrement… rien d’intéressant à en tirer.

ALYX – Nop, yep, meh rien de spécial.

Timélias bugua un instant. En même temps, c'était de sa faute à avoir enchaîné trois questions comme ça sans laisser Alyx répondre entre chaque ; pour autant il ne s'était pas attendu à ce que les trois réponses vinssent comme ça l'une après l'autre sans transition et de façon aussi brève.

Il regarda Alyx grimper agilement sur le rebord de la fontaine, à un endroit qui n'était pas encombré par le corps étendu de la Méga-Léviator, et remit les choses dans l'ordre dans sa tête.
« Nop » à la première question : tous les Dresseurs n'étaient pas en compétition selon elle. Donc les combats pokémons étaient un sport mais pas forcément une compétition entre Dresseurs. C'était intéressant, il fallait qu'Alyx développe ce point de vue.
« Yep » à la deuxième question : les badges d'arène étaient des trophées. Cela semblait paradoxal avec la réponse à la première question, pour le coup. Selon Timélias, un trophée servait justement à symboliser la victoire à une compétition. Bon, Alyx estimait que tous les Dresseurs n'étaient pas des compétiteurs, cela ne signifiait pas qu'elle n'en était pas une elle-même. Peut-être qu'elle voyait les combats pokémons comme une compétition tout en accordant aux autres Dresseurs d'être plus dans le... “loisir” ?
« Meh rien de spécial » à la troisième question : pas de pensée spécifique à l'égard des Dresseurs qui perdaient un combat d'arène. Alors peut-être que Timélias se mettait la pression pour rien ? Ce n'était peut-être pas si tragique même pour un Dresseur de perdre un combat d'arène.

Comme par merveille, Alyx développa sa pensée à propos de la première question sans que Timélias n'eût besoin de le lui demander :

ALYX – On peut faire du sport pour se détendre, on peut faire du sport pour s'amuser seul ou avec les autres, on peut faire du sport pour la compétition, on peut faire du sport pour se fixer des objectifs et être satisfait quand on les a accomplis, on peut faire du sport pour en faire son métier. Pourquoi ça serait différent avec les matchs pokémons ?

Vu comme ça, ça faisait sens. On pouvait donc être sportif sans être compétiteur. Hormis les combats pokémons, dont jusqu'à peu encore il n'avait pas su lui-même quoi penser, Timélias n'était pas un sportif, il avait vécu une jeunesse faite de choses simples et embellie par son amitié naïve mais sincère avec un Tadmorv qui avait partagé sa misère et l'avait aidé à la surmonter. Le sport, là-dedans, il avait eu l'impression de ne pas y avoir droit. Les sportifs, il les avait regardés de lui, et les avait vus se mesurer les uns aux autres, à essayer de montrer qui était le meilleur. Forcément, il avait associé “sport” et “compétition” comme deux choses intimement liées. Comme si le sport était forcément une question d'ego. Et puis fut arrivé son départ pour Maïlys et son entrée dans une école de Dresseurs, et il avait eu le sentiment de pouvoir exercer un sport par procuration à travers ses amis Pokémons. Il avait appris qu'un Dresseur affrontait des Champions d'arène pour remporter des badges et s'élever dans les plus hauts rangs de la Ligue – du moins c'est ce qu'il avait interprété, peut-être à tort, des cours qu'il avait reçu, d'autant plus que son école organisait des tournois entre élèves.
Et s'il avait une confiance en ses Pokémons aveuglée par l'amour profond qu'il leur portait, cela entraînait un biais : quand il perdait un match, non seulement il prenait tout pour lui et se sentait nul, mais il craignait de faire passer ses amis pour des Pokémons nuls également. Or, Timélias était plus accroché à la dignité de ses amis Pokémons qu'à sa propre dignité.

Alyx avait l'air de ne pas comprendre, depuis le début de la conversation, le cheminement de pensée de Timélias, mais tout ce qu'elle lui disait, et tout ce qu'Amelle avait dit avant elle, était très important. Il fallait aider Timélias à reconstruire l'idée qu'il se faisait des combats pokémons.
Amelle avait réussi à faire travailler Timélias sur son investissement émotionnel en lui faisant accepter que ses amis endurent des coups et puissent tomber inconscients, car cela était normal chez les Pokémons et n'avait aucune conséquence néfaste sur leur santé, les Pokémons connaissant eux-mêmes leurs limites qui n'étaient jamais franchies lors d'un combat pokémon standard dans les règles. Elle lui avait également permis d'avoir une autre vision des badges d'arène, autre que celle d'une étape obligatoire dans la vie d'un Dresseur.
Alyx, maintenant, était en train d'expliquer à Timélias que les combats pokémons étaient bien un sport mais qu'il y avait une multitude de façons et de raisons de pratiquer ce sport, et pas seulement par compétition. Cela pouvait juste être un jeu entre Dresseurs qui stimulait les Pokémons, cela pouvait aussi être une manière de renforcer les liens entre un Dresseur et ses Pokémons, cela pouvait servir à plein de choses, et pas simplement à gonfler son ego en voulant montrer qu'on était le meilleur. Timélias n'avait ainsi pas à toujours craindre d'être moins bon que les autres Dresseurs et à se sentir indigne de la confiance et de l'amour de ses amis Pokémons. Et il n'avait pas non plus à s'imaginer qu'en cas de défaite, ses amis passeraient pour des nuls.

ALYX – Oh t'en fais pas pour ça, c'est un effort collectif. Au pire des cas, les plus mauvais joueurs penseront que vous êtes tous nuls sans distinction ! Certains vont blâmer les Pokémons mais la plupart vont plutôt blâmer leur Dresseur. Alors, au final c'est toi qui as le plus de chance de te faire humilier, vraiment.
TIMÉLIAS – Bon, ça va, moi je m'en fiche qu'on pense que je suis nul, je sais déjà que je suis loin d'être le meilleur ! Enfin, du moins, c'est pas mon objectif, c'est pas pour ça que je suis Dresseur. Tant que mes amis sont heureux avec moi, c'est l'essentiel. Je veux juste pas qu'ils aient l'impression que je les envoie au combat pour qu'ils passent pour des nuls. Donc si tu me dis que c'est pas ce qui se passe, ça me soulage.

Il échangea un regard avec Snotigol, qui lui dit quelques mots avec un sourire et un hochement de tête. Sans savoir exactement ce qu'il venait de dire, Timélias ressentit pour autant l'intention : Snotigol essayait de lui dire qu'il n'avait pas à s'en faire pour ça. Timélias s'accroupit.

TIMÉLIAS – Je te remercie mon gros n'amour que j'adore.

Il serra le Tadmorv dans ses bras. Jananda, toujours sur les épaules du jeune Dresseur pieds nus, regarda pudiquement autour, façon aussi de surveiller qu'on allait les laisser tranquilles. Timélias ne mit pas trop de temps à rompre le câlin pour ne pas laisser Alyx en plan, et se redressa. Il gratouilla Jananda sous le museau puis lui caressa une partie du dos, pour ne pas afficher de préférence, même s'il savait que Jananda n'était pas du tout d'un naturel jaloux.

TIMÉLIAS – T'as combien de badges d'arène, toi ?

Voilà que ce type était encore dans une dépréciation dégoulinante qui ne semblait jamais s’arrêter. Un véritable puit sans fond dans lequel une quelconque estime de soi était totalement absente, à tel point que ça en devenait presque irritant. Le pire dans tout ça était qu’il semblait s’y complaire sans vraiment s’en rendre compte. C’était tout à son honneur de n’avoir pas grand chose à faire de l’avis d’autrui sur ses capacités, mais sa façon d’en parler et son attitude… Non vraiment il y avait quelque chose de bizarre.

L’égo quasi inexistant de ce dresseur et son manque d’assurance évidente n’échappaient pas non plus au gigantesque prédateur des océans, toujours lové paisiblement. Ses yeux rouges à demi ouverts jaugeaient l’être humain si frêle à l’allure de petit casse-croûte faiblard, une espèce rare qu’elle n’avait jamais croisée en mer avec toutes ces proies qui se prenaient pour des prédateurs. Celui-là avait l’air de connaître sa juste place. Une main sur ses écailles lui fit comprendre qu’elle devait arrêter de fixer Timélias de la sorte. Alors que de l’extérieur, la trop grande Léviator n’avait pourtant pas l’air bien différente avec son air renfrogné naturel, la meneuse de son nouveau banc avait reconnu ce regard là, un regard qu’elle ne connaissait que trop bien.

Alyx échangea un regard avec sa partenaire de toujours alors que le jeune dresseur et son Tadmorv se laissèrent un instant pour avoir un moment rien qu’à eux. Elle était très mal placée pour juger la relation de quelqu’un d’autre avec ses Pokémons encore moins avec un simple aperçu, il n’empêche que l’impression qu’elle en avait… clochait, sans trop qu’elle ne sache pourquoi.

“T'as combien de badges d'arène, toi ?”

La question prit Alyx tellement par surprise qu’elle ne put s'empêcher de s’esclaffer de rire. Ce n’était pourtant pas absurde, comme question.

“Pardon, pardon, y a rien de drôle je m’y attendais juste pas” s’excusa-t-elle “J’ai jamais dit que je faisais les badges. J’en ai aucun”

Et plus rien à prouver, à personne, depuis longtemps.

“Ça m’intéresse pas” expliqua-t-elle “Enfin, j’ai quand même défié la Championne Fée dans un combat amical dans lequel j’ai forcé un bel ex-aequo, sans vouloir me vanter” ajouta-t-elle complètement pour se vanter. “Mais c’était dans le cadre du Café de Combat”

Il fallait dire qu’elle ne s’attendait pas à grand-chose de ce match en ce qui concernait son résultat, déjà parce que la réputation de la Championne aux fées la précédait et ce n’était pas pour rien, et parce que ni l’une ni l’autre n’avait cherché absolument la victoire. Quelque chose de détendu d’un commun accord, et la démonstration de la nouveauté qu’était la Téracristallisation en Maïlys.

“Dis, je me posais une question”

L’amusement et la jovialité s’étaient totalement effacés de son visage pour laisser place à un soudain sérieux, qui rappelait que son regard glacé ne l’était pas seulement de part la couleur de ses iris.

“Ça t’es déjà arrivé de penser à l’autre dans tout ça ?”

Plutôt vague comme question, mais elle voulait attendre le parfait laps de temps pour le laisser être décontenancé et confus, sans lui laisser l’interroger en retour pour comprendre où elle voulait en venir et lui couper l’herbe sous le pied.

“L’autre Dresseur que tu affrontes. Ses Pokémons. Même les Pokémons sauvages, parfois. Un combat ça se fait entre deux partis. C’est un échange. Un moyen de communication à part entière, même. On peut tellement apprendre de l’autre dans un match. En tant que personne, j’entends”

Elle était redescendu nonchalamment du rebord de la fontaine pour remettre pied à terre, mains dans les poches.

“À chaque fois que tu parles de tes expériences de combat tu ne parles que de toi. On dirait que tu oublies qu’il y a un autre Dresseur de l’autre côté du terrain. Alors je me demandais si tu pensais à l’autre, en face de toi, quand tu combats”

Timélias sursauta presque à l'éclat de rire d'Alyx, qu'il dévisagea avec perplexité après s'être senti toisé par la belle Méga-Léviator. Qu'avait-il dit de si drôle ? Rien, Alyx en convint aussitôt en s'excusant pour cette réaction qu'elle attribua simplement à la surprise. Elle répondit n'avoir aucun badge car ça ne l'intéressait pas, bien qu'elle ait déjà eu l'occasion d'affronter une Championne et d'arracher un ex æquo.

Ainsi donc, Alyx voyait les badges comme des trophées et ceux-ci ne l'intéressaient pas. Elle ne devait donc pas être de ceux qui voyaient les combats pokémons comme un sport de compétition et qui voulaient ramasser des trophées pour se sentir plus forts que les autres.
Que Timélias eût raison ou pas en essayant de comprendre le point de vue d'Alyx, tout cela menait au moins à une chose : la vision qu'il avait développée, depuis ses premiers pas de Dresseur, sur les combats pokémons, sur la signification d'une victoire ou d'une défaite, sur le regard qu'un adversaire pouvait porter sur un Dresseur ou ses Pokémons vaincus, et sur l'attrait des badges d'arène, était loin d'être partagée par tout le monde. Il n'avait pas à s'en vouloir de tarder tant à concourir pour des badges d'arène : chacun y allait à son rythme et certains Dresseurs n'y voyaient même pas d'intérêt personnel. Il n'avait pas à avoir peur pour l'image renvoyée par ses amis Pokémons en cas de défaite : la plupart des gens n'y verraient pas un signe de faiblesse chez ces derniers, au pire certains jugeraient Timélias comme un mauvais Dresseur et ils ne seraient pas les meilleurs exemples. Si Timélias réussissait à voir les combats pokémons comme à la fois un jeu et une manière de communier avec ses amis Pokémons, alors la victoire ou la défaite n'importeraient plus, ou très peu.

Cette leçon était des plus importantes pour lui, et il pouvait déjà remercier Alyx de la lui avoir donnée.

Tout à coup, Alyx effaça son sourire avec une idée en tête et descendit de la fontaine, prenant une posture plus concernée. À son tour, elle surprit Timélias avec une question :

ALYX – Ca t'est déjà arrivé de penser à l'autre dans tout ça ?

Elle souligna “l'autre”, élément central sur lequel elle voulut interroger Timélias. Ce dernier se retint de répondre trop vite, attendant d'abord de voir où Alyx voulait en venir et s'il avait matière à se remettre en question.

ALYX – L'autre Dresseur que tu affrontes. Ses Pokémons. Même les Pokémons sauvages, parfois. Un combat ça se fait entre deux partis. C'est un échange. Un moyen de communication à part entière, même. On peut tellement apprendre de l'autre dans un match. En tant que personne, j'entends. A chaque fois que tu parles de tes expériences de combat tu ne parles que de toi. On dirait que tu oublies qu'il y a un autre Dresseur de l'autre côté du terrain. Alors je me demandais si tu pensais à l'autre, en face de toi, quand tu combats.

Alyx put voir à travers les yeux de Timélias tous les rouages de son cerveau s'enclencher pour essayer de décrypter la question. Même avec cet étayage, Timélias n'était toujours pas sûr de bien comprendre où elle voulait en venir.
Peut-être que la clé était dans la phrase « On peut tellement apprendre de l'autre dans un match. ». Alyx essayait peut-être de faire comprendre à Timélias qu'en se centrant uniquement sur ses propres émotions ou sur celles de ses amis Pokémons, il passait à côté de ce qu'il pouvait apprendre chez l'autre Dresseur ou chez un Pokémon sauvage.
Si c'était ça, alors Alyx avait sans doute raison, difficile de le nier.
Mais formulée comme elle l'était, la question pouvait tout aussi bien sous-entendre une sorte de reproche sur un potentiel égoïsme de Timélias. Comme si Timélias ne cherchait que son propre épanouissement – ou celui de ses amis Pokémons – dans les combats pokémons.
Là, Alyx tiendrait un propos un peu plus injuste.
Ce serait même un comble de penser cela alors que Timélias transpirait le manque de confiance en lui et dégoulinait d'amour pour les Pokémons, de naïveté et de pacifisme. Alyx oserait-elle le voir comme un énergumène égoïste ne cherchant les combats pokémons que pour son propre profit personnel ? Ce serait même très ironique de lui faire un tel reproche alors que quelques instants plus tôt Timélias venait de commencer une phrase par « à la place de ton adversaire », en désignant la Dresseuse du Gigansel.

Bien sûr que Timélias pensait à ce que pouvaient ressentir ou vouloir les autres. Il n'en était pas capable qu'avec ses amis Pokémons, ce serait absurde de penser cela. Enfant, Timélias s'était pendant des années privé de laisser Snotigol l'accompagner à l'école, précisément à cause des autres – élèves comme professeurs. Quand il avait osé parler de sa rencontre, cela n'avait rien arrangé au harcèlement qu'il subissait déjà – et il avait bien compris que les Tadmorvs étaient perçus comme répugnants.
Timélias avait souvent souffert dans son enfance du regard des autres, y compris des regards sur son amitié avec un Tadmorv. C'était donc cocasse de lui reprocher de ne pas penser aux autres... alors même qu'enfant il aurait bien aimé que l'on pense un peu plus à lui, ce que seuls son père, Snotigol et Madame Franti avaient fait.

Alors, dans quel sens fallait-il comprendre la réflexion d'Alyx ?

TIMÉLIAS – Je ne comprends pas bien où tu veux en venir. Je pense, oui, quand même, que je pense à l'autre. Tu cites l'exemple de Pokémons sauvages, mais certains de mes amis étaient des Pokémons sauvages, et je pense que c'est parce qu'ils ont senti que je pouvais penser à eux, qu'ils ont voulu rester avec moi. Là j'ai pensé à ce que pouvait ressentir ton adversaire tout à l'heure. Puis, enfin, je sais pas, c'est bizarre de me demander si ça m'arrive de penser aux autres alors que je viens de te poser plusieurs questions sur toi et sur comment tu vois telle ou telle chose... Pourquoi tu me poses la question ? Désolé si je te parais égoïste... mais je ne comprends pas bien.

Ce garçon était un véritable livre ouvert. Alyx pouvait lire toute la confusion sur son visage, aussi clair que le plus pur des cristaux. Elle aurait même juré voir ses neurones s’illuminer et s’agiter sous la réflexion.

La question n’était pourtant pas bien complexe.

Tandis qu’elle laissait Timélias se débrouiller avec ses pensées, elle attrapa une Pokéball pour enfin libérer la belle fontaine du monstre qui en avait fait son nid temporaire. Galimatias se laissa se faire rappeler dans un dernier bâillement avant de disparaître dans un rayon vermeille, à nouveau confortablement installé, mais dans sa petite sphère plus douillette qu’elle n’y paraissait. Le grand serpent de mer avait pu profiter d’un peu d’eau et du soleil un moment, il était temps de laisser le flot artistique de la fontaine se déverser normalement à nouveau.

Alyx n’avait cependant, à aucun moment, quitté son air grave, ni lâché Timélias du regard. Elle l’écouta sans rien dire, sans rien faire, sans rien exprimer, d’aucune façon, alors qu’il s’était remis à parler.

Un livre ouvert, le genre de bouquin un peu trop prévisible, à tel point qu’on pense à une diversion pour mieux surprendre le lecteur plus loin… et finir déçu qu’il n’en était rien.

Est-ce qu’elle avait vraiment envie d’y mettre davantage d'efforts ? C’était bien amusant au début mais tout ça commençait à ressembler plus à une corvée, et elle n’y voyait rien d’intéressant à y gagner si l’amusement n’était même plus présent. Quoique, à voir le cerveau du garçon carburer à chaque parole il allait peut-être finir par surchauffer, quelles étaient les chances pour voir sa tête prendre feu d’elle-même ?

“Les Pokémons, sauvages ou non, ont leur propre agenda, leurs propres objectifs et leurs propres ambitions, ils sont leur propre… personne. Et puis ils sont peut-être mystérieux mais ils ont pas la science infuse non plus. Est-ce ceux qui t’ont suivi l’ont fait parce qu’ils pensaient que tu allais t’occuper d’eux où est-ce qu’ils l’ont fait parce qu’ils pensaient pouvoir s’occuper de toi ?”

Elle ignorait depuis combien de temps Timélias voyageait avec ses compagnons et honnêtement elle n’en avait pas grand chose à faire. Et si le lien entre un Dresseur et ses Pokémons était propre à chacun, un Dresseur qui ne comprenait pas ses compagnons de route de longue date était au pire inquiétant, au mieux un peu triste. Est-ce que ce Dresseur là connaissait vraiment ses Pokémons ?

“Est-ce que tu as vraiment pensé à ce que mon adversaire ressentait pour la comprendre, ou est-ce que tu as projeté tes pensées, ton vécu, ta personnalité, et ce que toi tu aurais ressenti dans la même situation ? C’est deux choses bien différentes” enchaîna-t-elle “Perso j’ai mon avis sur la question”

Il y avait me mettre à la place de et si j’étais à sa place, similaire de premier abord mais drastiquement différent, opposé même, peut-être deux faces d’une même pièce finalement ? Un bon jeu auquel s’adonner quand on était une anomalie marchant aux côtés de vrais êtres humains.

“Est-ce que tu me posais toutes ces questions sur ma vision des choses, mes avis et mes expériences, par pure sincérité de me connaître et me comprendre, ou est-ce que tu me demandais tout ça pour ton propre apport personnel ?”

Les deux n’étaient pas incompatibles et c’était sans doute ce qu’il y avait de plus normal et naturel dans le lot, mais elle n’allait certainement pas lui mâcher le travail. S’il ne pouvait penser qu’en noir et blanc sans aucune nuance de gris il allait finir par l’apprendre un jour ou l’autre… ou pas, d’ailleurs.

“Est-ce que tu penses vraiment aux adversaires en face de toi quand tu combats ? Le Dresseur et ses Pokémons ? Ou est-ce que tu restes trop focalisé sur toi, tes émotions, tes pensées, et tes Pokémons uniquement ?” réitéra-t-elle avec insistance.

Alyx n’attendait aucune réponse concrète à la plupart de ces questions. Ce n’était pas comme s’il y avait une bonne et une mauvaise réponse. Les nuances de gris, pas vrai ? Elles étaient davantage là pour l’amener à réfléchir, à s’interroger, à se remettre en question si c’était nécessaire. Mais le sujet d’origine était bien les combats et son interlocuteur n’avait, au final, pas répondu à cette question la plus importante alors elle ne s’était pas gênée pour la reposer en guise de conclusion.

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