Donjon et Dragon [ft Salizyr] [TERMINÉ]

La Fragroin fonça sur Salizyr qui évita le coup sans trop de soucis en repoussant même son adversaire dans la foulée. Au lieu de continuer à se battre de lui-même, il envoya l’un de ses compagnons, un Grelaçon. Ralsen s’en étonna un bref instant avant de se rappeler que le Dracaufeu était également un dresseur, en un sens, et puis l’endroit était sans doute trop étroit pour qu’il puisse combattre correctement.

Le Grelaçon renforça ses défenses déjà bien solide, la secouriste reconnut ce qui semblait être une Armure. Pendant ce temps, le Tourbi-Sable de Spine avait fait mouche, une tornade désagréable aux allures presque un peu effrayante allait le gêner dans sa vision, ses mouvements, et lui picoter la peau quelques minutes. Salizyr étendit une patte devant Ralsen qui lança un regard interrogateur vers la salamandre. Qu’est-ce qu’il préparait ? Il lança un ordre au Grelaçon et la poudreuse qu’il envoyait semblait trop faible être être un Blizzard, une Poudreuse ? Un Vent Glace ? Dans le doute, Ralsen décida d’éviter une combinaison d'attaques.

“Spine, prépare toi avec un Affilage !”

Elle n’allait pas pouvoir assurer les arrières du Grelaçon sur ce coup là, il ne fallait pas que la Kraknoix se mêle à l’attaque glace, mais le petit Pokémon saurait encaisser le Coup d’Boule, il fallait lui faire confiance, à lui et son dresseur. Spine se concentra, son regard plus brillant que les étoiles qui constituait ses yeux, prête à frapper fort.

“Sable Ardent sur Kicklee, donne tout ce que t’as !”

Le plus gros danger, c’était le Kicklee. Un avantage considérable sur le Grelaçon, et de bonne résistance à une bonne partie de l’arsenal de Spine qui ne pourrait pas utiliser ses attaques Sol à son avantage dans un endroit pareil. Ralsen ne voulait pas risquer de faire s'effondrer les ruines sur eux et les options devenaient vite limitées. Elle croisait les doigts pour brûler son adversaire, après avoir limité ses mouvements à l’aide d’une tornade douloureuse qui l’accompagnerait partout, elle voulait l’empêcher de taper fort et grignoter toujours plus son énergie.

“Happy, Puissance ! Coco, Coud’Boue sur Grelaçon !”

Ses Pokémons agissaient plus lentement. Vent Glace donc ? C’était tout à leur avantage de ralentir leurs adversaires, parfait ! Ce qui était moins parfait, c’était la Puissance du Kicklee, il cherchait déjà à contrebalancer l’effet d’une potentielle brûlure. Spine lançait déjà son attaque, elle n’allait pas pouvoir encaisser la boue pour le Grelaçon. Nouvelle attaque à l’aide de sable, la Kraknoix grogna pour conjurer un souffle sablonneux à la chaleur tellement intense qu’on pouvait se demander comment cette poussière ne s'était pas déjà changée en verre. Pendant que le Kicklee du nom de Happy se concentrait pour assurer des coups plus précis à l’avenir, du sable brûlant se mêla à la tornade, profitant de l’élan du donné par le maelstrom pour frapper le Pokémon Combat de toute part dans les points les plus sensibles de son corps. Entre la grimace qui se lisait dans ses yeux et les marques noircies sur son corps, nul doute qu’il avait fini Brûlé.

La Fragroin, de son côté, envoya son Coud’Boue vers le Grelaçon, son dresseur voulait sans doute temporiser un peu les actions de son adversaire et éviter à son autre Pokémon une seconde attaque. Dresseur qui, d’ailleurs, avait fait l’effort de se redresser et essayait même de se relever en prenant appuis contre le mur pour se donner un peu plus de contenance malgré sa blessure qui lui faisait un mal de Ponchiot.

La Lucario restait en arrière, bras croisés, sans quitter leurs adversaires des yeux. C’était à la jeune soldate de gérer ce combat, mais elle allait observer chacun des mouvements du fuyard et de ses Pokémons, et au moindre signe de véritable danger, elle interviendrait pour mettre fin au problème. L’humain avait l’air de se débrouiller sans être le meilleur des combattants et ses deux Pokémons ne semblaient pas menaçants,  ils ne devraient pas poser problème et s’ils avaient plus d’un tour dans leur sac elle pourrait y aller sans se retenir. Les humains n’étaient pas difficiles à terrifier, surtout les lâches dans son genre.

Salizyr sembla ordonner une nouvelle attaque à base de souffle glacé, quelque chos de plus doux mais de plus fourni en flocon de neige. Le pauvre Kicklee allait se retrouver face à un sacré chaud froid. La tornade de sable lui grignotait son énergie avec des grains qui semblaient trop acéré pour leur taille ridicule, la nouvelle attaque de Spine lui brûlait la peau et maintenant la Poudreuse venait non pas apaiser la chaleur de la poussière ardente mais venait simplement apporter sa propre morsure non pas à base de chaleur mais à base de froid glacial. La Fragroin aussi devait essuyer le souffle enneigé, mais semblait bien moins perturbée que son partenaire.

“Happy, Ultimawashi sur cette sale Kraknoix ! Coco, Voix Enjôleuse !”

Oh non.

Pas le temps de se dissimuler dans le sol - et puis Ralsen avait trop peur que tout l’attirail de l’élément de prédilection de sa plus vieille amie n’endommage la structure - pas le temps de l’aveugler et de bouger, la Kraknoix allait devoir encaisser le coup dévastateur et profiter d’être au contact pour enchaîner. Ténèbres contre Combat, la mâchoire d’acier de Spine ne devait pas être prise à la légère pour autant. Il fallait juste attendre le bon moment.

La secouriste espérait encore que le Kicklee manque son attaque. Entre le froid mordant qui ralentissait ses mouvements, la brûlure gênante et le sable qui l’entourait encore, quoique faiblissant, elle espérait, mais elle espérait vainement. Spine se prépara à l’impact tandis que son adversaire réduisait rapidement l’espace qui les séparait. Elle n’était pas la plus vive des créatures en dehors du sable où de ses tunnels, mais elle pivota pour éviter de réceptionner la frappe sur sa tête, mais sur son petit corps à la place. Coup brutal, trop même, critique si on voulait, la Kraknoix manqua un bâtiment de cœur et oublia comment respirer l’espace d’un instant, et elle n’était pas la seule. C’était peut-être elle qui avait encaissé l’attaque, mais sa dresseuse avait eu la même réaction viscérale.


“Mâchouille !”

Avant de se faire éjecter par la puissance du coup, au moment fatidique de l’impact même, alors que leurs deux souffles s’étaient arrêtés, Spine s’exécuta sur l’instant pour saisir la jambe du Kicklee entre sa mâchoire dévastatrice avec toute la force qu’elle possédait. Oh le coup qu’elle avait pris avait été des plus désagréable sur son petit corps, et ce malgré la Brûlure handicapante qu’elle avait infligé plus tôt à son adversaire. Mais elle avait survécue à la roche en fusion crachée par le volcan et à l’effondrement des bâtiments engendré par l’éruption, sa carapace savait encaisser, et elle n’allait pas se gêner pour rendre les coup en broyant les meilleures armes de son adversaire. Elle était bien résolue à ne pas le lâcher, sa mâchoire était là pour rester fermée et ses crocs plantés.

“Qu’est-ce que- Happy débarrasse toi d’elle avec Pied Brûleur ! Coco enchaîne avec Tête de Fer !”

Le pauvre Kicklee qui n’en pouvait déjà plus de tous ces petits grignotages douloureux agaçants, il devait maintenant se dégager la jambe d’une morsure d’un tout autre niveau de douleur. La Mâchouille allait certainement le laisser boiteux avec un bon point faible en cet endroit blessé même s’il arrivait à s’en libérer. Il commençait presque à paniquer quand l’ordre de son dresseur le ramena à la réalité, alors il entoura ses jambes de flammes pour mettre l’ordre à exécution. Il bondit de son pied valide pour tournoyer dans les airs et frapper Spine au sol de toutes ses forces avec un peu d’aide de la gravité, et bien sûr, des flammes qui entouraient la Kraknoix autant qu’elles entouraient ses membres inférieurs.

Spine n’avait pas peur du feu comme ses deux autres amies aux visage marqués par les flammes, alors elle avait essayé de tenir bon malgré les langues brûlantes qui rendait toute sa tête douloureuse.

“Spine, lâche !” lança Ralsen avec craquement dans la voix qui traduisait son inquiétude.

Si les deux partenaires avaient été synchronisées quelques secondes auparavant, la vue des flammes qui entourait sa Kraknoix avait déconcentré la secouriste dont le cœur s’emballait de frayeur pour son amie. Elle ne voyait plus ce qui l’entourait, son champ visuel rétréci par la peur. Et Spine ne lâchait pas, elle ne voulait pas lâcher malgré ce nouveau coup trop violent qui l’avait même sonnée l’espace d’un instant, mais pas assez pour empêcher son instinct de serrer ses crocs.

Elle ne voulait pas se démonter pour rien au monde, il était plus grand il frappait plus fort et il était avantagé devant elle qui était handicapée par leur environnement qui aurait dû pourtant elle un véritable chez elle, mais elle était déterminée à lui faire mordre la poussière, littéralement. Et puis personne n’avait le droit d’inquiéter Ralsen. Alors, son corps se mit à briller.

Le Kicklee ne le vit pas tout de suite, les flammes commençaient à peine à se dissiper après son coup, il pensait s’en sortir alors qu’il sentait l’emprise de son adversaire sur sa jambe se desserrer. Non, changer. Moins large, moins de dents. Alors que Spine changeait de forme, le Kicklee ne sentit plus le sol sous ses pieds et étouffa un cri de surprise, décontenancé. Il allait retrouver les dalles bien vite, mais pas sous ses pieds. Encore entourée d’une lumière blanche, Spine le fracassait au sol dans tous les sens en une Surpuissance sous le regard de Ralsen, qui était passé de la peur à l’émerveillement.

Spine finit son enchaînement en lâchant enfin son adversaire d’un dernier coup fracassant au sol alors que le cocon de lumière éclata pour révéler sa nouvelle apparence de Vibraninf, d’une taille étonnamment grande comparé à sa petite taille de Kraknoix. Elle ne pouvait plus claquer des mâchoires de façon menaçante pour provoquer son adversaire, mais les habitudes s’accrochent, alors elle accompagna les vibrations stridentes de ses nouvelles ailes d’un grognement qui révélaient ses moins nombreux crocs.

Ralsen n’avait pas le temps de profiter de ce moment magique qui avait avait s’envoler ses inquiétude, elle devait remettre son esprit dans le combat. Spine avait encaissé de sales coups et elles allaient devoir mettre vite fin au combat avant le prochain. Elle se permit tout de même un sourire, alors que sa vieille partenaire lança un bref regard en arrière pour s’assurer que tout allait bien. Dans la panique, Ralsen avait oublié le plus important, elle ne pouvait pas se battre avec ses compagnons s’ils n’étaient pas sur la même longueur d’onde. Cela n’allait certainement pas se reproduire aujourd’hui, elles étaient toutes les deux prêtes pour la suite, le cœur battant à l’unisson.

Elle adressa un regard à Salizyr. Elle s’était laissée distraire, tout s’était enchaîné si vite, elle voulait s’assurer que lui et son Grelaçon allait bien, physiquement mais surtout moralement.

Salizyr s’était retrouvé distrait par l’évolution de Spine, et l’échange de regard entre les deux dresseurs en fut bref. Son Grelaçon venait de subir une nouvelle attaque, et pas des moindres, la Tête de Fer avait fait mouche. Il répliqua vite sous les ordres du Dracaufeu mais manqua sa cible, les yeux sans doute encore gênés par le Coud’Boue précédent.

Le combat arrivait à son terme, tous les Pokémons étaient fatigués et chacun avait encaissé son lot de dégâts conséquent. Spine semblait gonflée à bloc malgré tout, grâce à son évolution qui lui avait donné une énergie nouvelle, mais malgré ça, Ralsen ne voulait pas prendre le risque de la laisser subir plus d’un assaut supplémentaire. Elle avait seulement l’air en forme.

“Happy, finis-en avec elle : Close Combat ! Coco, éclate ce glaçon avec une nouvelle Tête de Fer !”

Instant décisif, est-ce que la Vibraninf et le Grelaçon allaient pouvoir mettre leurs adversaires au tapis en premier ? Ils allaient tapper fort, très fort. Ralsen s’apprêtait à ordonner un Tunnel lorsqu’elle aperçut un mouvement de la part du Pokémon Glace qui fonça s’interposer. Il lança ce qui ressemblait à un Abri et parra totalement la Close Combat destinée à Spine avant de devoir encaisser brutalement une deuxième Tête de Fer.

Il fallait le bon timing. Le sacrifice de son allié ne serait pas vain, la secouriste voulait profiter de leurs deux adversaires parfaitement alignés après que tous deux furent obligés de frapper le pauvre Grelaçon.

“Maintenant ! Draco-Souffle !”

À la seconde ou Salizyr sortit la Pokéball de son compagnon pour le rappeler, Ralsen donna son ordre. Prit bien vite dans le rayon rouge, le Pokémon Glace n’était plus dans la ligne de mire et la Vibraninf déversa le souffle draconique qui frappa en premier la Fragroin, la plus proche après sa dernière attaque, avant de frapper le Kicklee qui se prit son alliée au passage, projetée par l’attaque à bout portant.

Pas la plus puissante des attaques, mais après la Surpuissance qui avait fatigué sa force physique, Ralsen avait préféré jouer la sécurité. Il y eut un léger moment de flottement, comme pour savoir qui restait encore debout, qui était à terre, si leurs adversaires étaient bien vaincus, s’ils étaient encore sur leurs pattes.

Soupir de soulagement d’un côté en voyant le Kicklee et la Fragroin au sol, grognement désespéré de l’autre. Le fuyard rappela ses Pokémons en les remerciant à voix basse avant de tenter de prendre ses jambes à son cou malgré sa blessure, se reposant sur l’adrénaline seule. C’était sans compter une certaine Lucario qui se mit bien vite en travers de son chemin, une Vive Attaque sans doute, quoique si rapide qu’elle avait semblé à peine visible sur le trajet. Appendice sensoriel flottant, ses iris carmin qui paraissaient presque luire dans l’ombre, elle projetait une aura menaçante qui lui donnait une carrure plus imposante qu’elle ne l’était réellement aux yeux du blond. Le fuyard recula et trébucha, aussi bien par peur que de part sa cheville abîmée qui le lâchait déjà.

“Mais qu’est-ce que vous me voulez à la fin ?!” s’écria-t-il en ayant du mal à ne pas monter dans les aiguës.

Ralsen lança un regard vers Salizyr avant de prendre la parole.

“On nous a signalé un agent d’Abyss en fuite depuis Sableye, on a suivi la piste jusqu’ici” Elle marqua une pause en regardant vers la blessure du fuyard avec un air sincèrement désolé “Pardon pour ça. Mais tu devrais t’expliquer. C’est toi ? Et pas de mensonge, elle saura” ajouta-t-elle en indiquant la Lucario.

Aucune chance qu’ils se soient trompés, mais elle se devait d'être sûre. Plus d'erreurs, plus jamais.

“Je n'ai rien fait de mal ! Mes affaires à Sableye ne vous regardent pas !”

Ralsen n’était pas certaine de la marche à suivre. Ce n’était pas comme si elle savait ce que cet homme avait fait à Port Sableye. S’il n’avait commis aucun crime, aucun délit, elle ne pouvait décemment pas l’arrêter. Et s’il avait simplement fureté en ville et autour de la base… c’était à peine une infraction. Ça serait à ses supérieurs d’en décider de toute façon, mais on ne pouvait clairement pas parler d’arrestation. Pour l’instant elle faisait confiance à ce que Salizyr lui avait rapporté, et ses collègues qui devraient arriver en renfort en saurait sans doute plus. Elle voulait simplement éviter une situation similaire… de ce jour-là.

Salizyr gronda, impatient, et le fuyard se remit à parler en revenant sur ses dires.

“Ok, ok ! Vous savez les émeutes à Megapagopolis ? Bah y'a des gens qui pensent que le Stern était venu là-bas pour chercher le morceau de carte qui était en fait au musée, leurs informations étaient juste pas bonnes et ils ont essayé de maquiller ça en une opération contre Abyss, sauf que leur mensonge est vite tombé à l'eau, vu qu'y avait rien du tout ! Et les gens qui pensent que le Stern était venu chercher le morceau de carte, se disent que s'ils étaient au courant de son existence, c'est peut-être parce qu'ils ont déjà l'autre partie, ici à Sableye !”

Ralsen ne comptait pas démentir ou confirmer quoi que ce soit devant cet agent d’Abyss, mais elle avait bien du mal à dissimuler sa confusion devant autant d’informations erronées, étranges, ou trop absurdes. Peut-être faisait-elle trop confiance à ses supérieurs mais il n’y avait pas de doute quant au fait que le STERN ne savait rien de cette carte avant l’histoire du musée. Elle l’avait remise elle-même, et si les haut gradés savaient faire preuve de stoïcisme au besoin, ils avaient eu l’air trop curieux pour connaître cette vieille relique. Et elle savait qu’ils ne possédaient pas non plus l’autre bout, ils étaient censés le chercher, et chaque soldat devait rapporter le moindre indice, aussi insignifiant soit-il. Et pour couronner le tout, le fragment qu’ils avaient récupéré n’était de toute façon pas à la base.

“Donc… t’admets que t’étais en train d’essayer de voler le STERN ?” demanda Ralsen pour avoir confirmation.

“Non !” C’était au tour de la Lucario de se voir menaçante envers le fuyard, il ne disait pas la vérité clairement “Enfin pas vraiment ! Juste… du repérage ! Pour…” Il s’arrêta de parler, sentant qu’il s’enfonçait davantage dans les problèmes.

Ralsen soupira. Plus le choix, et puis fouine ou non ce type avait le droit d’être interrogé… normalement.

“Je vais devoir te ramener à Sableye. Des renforts du STERN devrait pas tarder à arriver aux ruines, et on va devoir t'interroger” expliqua-t-elle “Alors, tu peux me suivre sans essayer de fuir à nouveau, et je pourrais t’aider à marcher. Sinon je vais devoir t’attacher les mains, mais honnêtement j’ai pas très envie de te porter” précisa-t-elle en se grattant la tête.

Le choix était sien. Tandis qu’elle le laissa réfléchir, elle se concentra sur son allié et compagnon de mission improvisée. Elle avait bien senti son agacement un peu plus tôt, sans doute parce qu’il avait une sacrée dent contre Abyss, entre ça, son attaque sans plus d’avertissement, sa colère non dissimulée. Difficile de lui en vouloir, l’organisation avait une réputation des plus fluctuantes… Et certains de ses membres étaient répréhensibles à bien des égards.

“Désolée… C’est mon job, je suis pas une justicière, j’ai des règles à suivre et je représente le STERN en un sens. Je peux pas faire les choses n’importe comment. Puis… Récemment une erreur de collègues qui ont abusé de leur statut a causé une vraie catastrophe… Je peux pas faire comme eux, je dois faire mieux, être mieux que ça. Tu vois ce que je veux dire ?”

Le fuyard d’Abyss n’avait pas à entendre tout ça, malheureusement leur environnement était trop exigu et parler tout bas n’aurait sans doute pas changé grand-chose. Elle ne pouvait pas se permettre de faire n’importe quoi, c’était vrai. Et elle savait aussi que tous les membres d’Abyss n’étaient pas des dangereux criminels. Beaucoup étaient simplement des âmes en peine désespérée qui cherchaient juste à ramener un être cher, et parmi ceux-là, elle le savait, elle en avait rencontré, il y en avait qui ne supportait pas certaines méthodes que l’organisation avait pu montrer… ni certaines méthodes de leurs anciens supérieurs.

La Lucario ne put retenir un rire moqueur lorsque Salizyr proposa son aide généreuse à l’humain fuyard. Peut-être que se faire traîner visage dans le sable brûlant par des Pokémons lui remettrait les idées en place… à moins que cela ne grille les trois neurones qui se battent en duel au creux de son crâne. Elle n’arrivait toujours pas à croire que ce type aux faibles compagnons peu adaptés à une quelconque mission d’infiltration ait eu l’audace de s’approcher de la forteresse de soldats humains comme ça. Mais la petite soldate avait trop bon coeur et elle n’aurait définitivement laissé ni le Dracaufeu ni elle maltraiter le fouineur, même un peu, même pour rire.

“Bon, vous m'emmenez, qu'on en finisse ?...”

Ralsen s’apprêtait à le rejoindre avant de se raviser en voyant Salizyr écrire sur son carnet. L’agent d’Abyss regarda le Dracaufeu d’un air interloqué, d’abord il envoyait des Pokémons comme un dresseur et maintenant il écrivait.

Merci pour ton aide. Mais je veux pouvoir en arrêter d'autres comme lui. Je veux aider le STERN.

Ralsen plissa un peu les yeux, plus à cause de la lumière tamisée de l’endroit qu’à cause de l’écriture grossière du Pokémon, cette fois.

“Honnêtement, on manque de monde, alors…” commença-t-elle en se grattant la tête.

Elle rejoignit enfin le fuyard et s’accroupit près de lui et sortit le nécessaire des pochettes à sa ceinture pour s’occuper de sa blessure avant qu’ils ne se mettent en route. Agent idiot d’Abyss ou non, elle restait une secouriste, et puis personne n’avait envie que cet homme ne se plaigne davantage de sa situation.

“C’est pas moi qui peut en décider, mais si tu nous accompagnes à Sableye tu pourras en parler à mes supérieurs. T’es un dresseur après tout !”

Rafistolage sommaire et temporaire terminé, et tout ça sans que le patient de s’en plaigne trop - il avait définitivement peur des Pokémons autour d’eux -  elle aida l’Abyss à se lever.

“Je sais pas comment ça peut se passer avec un Pokémon, mais on sait jamais. Par contre faudra éviter de… euh, taper d’abord et poser les questions ensuite, si tu nous rejoins” Elle eut une grimace gênée “Notre réputation est déjà pas top depuis quelques temps”

L’agent d’Abyss eut l’air d’avoir du mal à retenir un rire sans aucun bruit et eut droit à un regard sévère de Ralsen, devant lequel le fuyard changea vite d’expression pour se tenir à carreau. Même sa patience avait des limites. Elle entama la marche du retour, il suffisait de rebrousser chemin, non sans un regard vers Spine pour l’interroger du regard et savoir si elle voulait se reposer dans sa Pokéball. La nouvellement Vibraninf répondit simplement en prenant la tête du groupe avec un sourire à sa dresseuse.

La Lucario avait patiemment attendu avant de se permettre de répondre à la question de Salizyr.

“Reiki” Elle posa son regard vers le carnet du Dracaufeu avant d’indiquer Ralsen d’un mouvement de tête “Ne lui dit pas. Je lui dirai moi même, le moment venu” Si cet instant ce présentait, s’il était possible qu’il arrive. En sentant sa propre mélancolie affluer autour d’elle, et voulant couper court au ton trop solennel qu’elle avait prit sans vraiment le vouloir, elle reprit avec plus de légèreté et une pointe d’air taquin “Et puis tu n’es pas le seul à savoir écrire le langage humain. C’est pas grand chose par rapport à toi, mais je sais épeler mon nom”

Le nom gravé sur l’ancien collier, celui qu’on lui avait mis autour du cou à sa naissance, qu’elle avait gardé comme une chaîne jusqu’à ce qu’il se brise d’usure, dont elle avait conservé les restes encore des mois durant comme un avertissement pour elle même, pour ne pas oublier. Les traits qui formaient ces lettres cousues dans le cuir étaient maintenant gravés dans sa mémoire. Et elle avait eu la bonne ou la mauvaise idée de s’exercer, alors encore petite Riolu, quand le collier commençait à trop s’abîmer, de peur de ne plus pouvoir montrer son nom aux humains, encore trop naïve malgré les abandons et les rejets qui s’étaient succédé… bien avant qu’elle ne tourne la page pour laisser la colère prendre la place du chagrin.

“Est-ce que ces vermines méritent vraiment autant de protocole ?...”

“Celui là ? Pas vraiment. Mais d’autres… Va savoir. Tout n’est pas noir ou blanc dans cette histoire”

Le vécu de Reiki avait été trop étrange, née dans l’un de ces groupuscules qui avaient terrorisé l’île, sa vision du monde et des humains était bien différente à l’époque. Elle en était sortie, elle y était retournée, baladée de dresseurs en dresseurs. La venue de Deoxys avait tout changé, c’était l’impression qu’elle et de nombreux Pokémons avaient eu des années en arrière, pourtant leur façon de se comporter et de s’organiser en tant qu’armée libre avait été étrangement anthropomorphisée. Passée d’une structure à une autre avant d’arriver à la plus grande liberté qu’elle avait connue en rejoignant le Village, elle avait eu son lot d’expériences. Même chez les pires criminels au coeurs les plus sombres, les règles avaient des raisons d’exister.

Et pour avoir été témoin d’une bonne partie des tragédies qui avaient touché leur île, parfois en étant elle-même en première ligne, les humains étaient particulièrement durs envers ceux qui prétendaient faire le bien.

Au début, elle ne comprenait pas. Et puis, elle avait réfléchi. Et en pensant à son propre vécu, elle avait compris. Humains et Pokémon avaient été trahis, trompés, flouer mainte et mainte fois, pris de désespoir trop de fois, avec des victoires qui n’en avait que le nom tellement les pertes étaient palpables. Quand on était blessé encore et encore, une répétition qui ne s’en arrêtait plus, comme une créature meurtrie il était difficile de faire confiance à une main tendue, et le premier haussement de ton et le premier geste brusque pouvaient être pris comme une agression.

Salizyr s’approcha en bousculant par inadvertance l’agent d’Abyss qui retint un juron agacé de justesse, de peur des remontrances qui pouvaient lui tomber dessus. Ralsen l’empêcha de tomber à cause de sa cheville abîmée et le remit bien stable sur ses pieds sans un mot.

“Je ne dirai pas ton nom à Ralsen, c'est ton histoire, pas la mienne”

“Merci”

Il n’y avait pas besoin de sixième sens pour sentir la sincérité avec laquelle le Dracaufeu lui avait répondu. C’était important pour elle, et en un sens, ça faisait sans doute partie de sa guérison.

“Nous sommes partis sur de mauvaises bases, toi et moi. Je te remercie de m'avoir aidé, avec Ralsen”

Oh ?

“De rien. C’est son travail… non, plus que ça, c’est sa raison de vivre” elle haussa les épaules “Et moi j’ai juste donner un léger coup de pouce”

Et la mission qu’elle s’était donnée dès l’instant où elle s’était remise de la guerre de Deoxys. Ses erreurs passées n’étaient pas réparables ni quelque chose qu’elle jugeait pouvoir compenser non plus. Alors elle ajoutait un peu de bon dans le petit monde de l’île pour enterrer tout le mal qu’elle avait pu faire. À petite échelle, chez les Pokémons, pendant quelques années. Maintenant il était temps de voir les choses en grand, et elle savait qu’elle n’y arriverait pas seule. La petite soldate lui était apparue comme une étoile filante dans le ciel sombre et peut-être réussira-t-elle à exaucer son vœu.

Salizyr regarda bien brièvement vers Ralsen avant de se faire plus discret. Cette dernière n’y fit pas plus attention que ça, quoique arborant une mine interrogative, déjà bien curieuse des échanges entre les deux Pokémons.

“Ils sont tous aussi protocolaires qu'elle, au STERN ?”

“Ah, ouais, j’ai l’impression. Ils sont pas si différents des flics, y a des règles à suivre” répondit-elle avant de se rendre compte que Salizyr n’avait peut-être jamais eu affaire à la police. Il n’y avait pas de doute qu’il avait sa propre expérience avec les humains, mais lesquels, ça, elle l’ignorait “En gros même si les criminels sont des enflures ils ont quand même le droit d’être traités avec un minimum de respect, comme des personnes. Et comme tu as dû l’entendre des deux humains, le STERN a perdu en réputation récemment, justement parce qu’ils ont été trop violent, alors ils font encore plus attention à leur façon d’aborder des gens suspects”

Reiki avait bien senti cette tension constante chez tous les humains qu’elle avait pu croiser, depuis que le Mal avait englouti l’île dans ses ténèbres cauchemardesques. À vouloir reprendre du service à fourrer son museau dans les affaires humaines pour mieux anticiper la prochaine catastrophe, cette tension accumulée l’avait inquiétée. Elle ne connaissait ça que trop bien, une émotion enfouie, contenue trop longtemps qui ne cherche qu’à exploser à la première occasion. La créature blessée qui mord au premier geste déplacé.

Le Dracaufeu ne semblait pas convaincu par les mots de Reiki. Sans même un sixième sens, il n'était pas difficile de sentir la rancoeur qu’il entretenait pour l’organisation de l’ombre continuellement, à chaque mention. Le Pokémon Aura espérait qu’il ne commette pas l’irréparable dans ce qui ressemblait à une quête de vengeance. Si elle nourrissait des doutes quant aux membres d’Abyss, la petite soldate et ses connaissances le lui avait confirmé : pas tous n’étaient des guerriers, pas tous n’étaient des personnes mal intentionnées. C’était même le contraire, lui avait-il semblé, beaucoup les rejoignait par désespoir, ou plutôt, par espoir de revoir des êtres chers. Et si les têtes de l’organisation de l’ombre avaient de mauvaises intentions… ils ne faisaient que manipuler et utiliser toutes ces âmes. Ils ne seraient pas les premiers. Elle en avait été victime.

Salizyr rejoignit Ralsen pour lui montrer un nouveau message. L’agent d’Abyss voulut faire un écart, apeuré, mais fut bien vite rattrapé par la secouriste. À force de bouger n’importe comment, cet idiot allait finir par trébucher à nouveau, ou pire, aggraver sa blessure.

Je vous accompagne à Sableye.

“Okay, ça marche” approuva-t-elle avec un sourire.

Elle se demandait si ses deux compagnons envoyés chercher du renfort allaient revenir bientôt. Il n’en avait plus vraiment besoin, mais quitter leur position avant leur retour allait rendre les retrouvailles plus compliquées. Et puis, elle ne disait pas non à un trajet véhiculé pour le retour.

Au même moment, elle perçut la Lucario s’agiter. Elle avait levé la tête en direction de ce qu’on pouvait facilement deviner être l’entrée par laquelle ils étaient tous venus. Ils n’étaient pas très loin du piège qui les avait fait descendre, et par extension, proche de la sortie. Ralsen interrogea le Pokémon Aura du regard. Des alliés ? Du danger ? La Lucario répondit d’un sourire qui rassura la secouriste.

Le reste du trajet se fit sans embûche. Ralsen aida l’agent d’Abyss à se hisser en hauteur une fois arriver au bas du piège, le reste n’était que de la marche. Progressivement, le frais des profondeurs du temple laissait place à la chaleur du désert alors que l’extérieur approchait. Spine fut la première à sortir, bien contente de retrouver la vue du sable, et surtout de profiter de sa nouvelle apparence pour voler plus librement.

Première dehors, et première à retrouver ses deux amis qui, après un bref moment de surprise, s’exclamèrent de joie en voyant la Kraknoix devenue Vibraninf, évoluée elle aussi, enfin. Ralsen regarda la petite réunion avec le sourire, et profita de l’instant quelques secondes avant de se remettre au travail.

Avec ses deux compagnons féériques étaient arrivés deux collègues. Non loin était posé un Taxi Volant et le Vaututrice d’une taille remarquable qui en était le pilote, appartenant à l’un des deux miliciens. Ralsen rapporta brièvement les événements et présenta Salizyr à ses collègues, ce après quoi ils purent tous se mettre en route par les airs. Direction : la base du STERN.