[Terminé] Grosse bringue des méchants sataniques et maléfiques et démoniaques

Spoiler:

Axelle adorait les soirées à la base. Mis à part les deux-trois relous qui trouvaient à leur goût ses formes dont elle se serait bien passée, l'ambiance était d'enfer. Ils avaient réinstallé le ring de boxe, et elle mourrait d'envie d'y monter. Mais pas contre le blond.
C'était le genre de mec trop grand et dégingandé, avec des petits yeux sombres et une tête de fouine, qui se pourléchait les babines à chaque donzelle qu'il voyait passer, lourdingue et colérique, avec une petite moustache de péteux dégueulasse qui contenait sûrement les morceaux du gros vomi qu'il avait lâché la veille, et qui était terriblement rapide dans ses coups. Autant dire qu'Axelle n'avait pas sa chance. Seul un bourrin pouvait venir à bout de ce genre d'individu... Et Axelle ne pouvait venir à bout que d'un bourrin.

Heureusement, sa chance tourna. Un barbu bien stock se pointa sur le ring, et parvint à déjouer la garde du pervers à tête de fouine. Une lueur d'intérêt s'alluma dans les yeux d'Axelle. Avec ses manières de bûcheron viril et sa barbe dégoulinante de la bière qu'il venait d'avaler cul-sec pour sa victoire, l'homme était... terriblement séduisant. C'est donc tout naturellement qu'Axelle s'approcha du ring avec l'objectif clair de lui péter la gueule.

Sauf qu'il y avait la queue pour affronter le dude. Bigre, plus de dix personnes attendaient là, certains depuis un bon moment ! Sauf qu'on n'était pas à la poste, ma petite dame. Le Racaillou sur son épaule comprit l'impulsion de sa dresseuse et sauta au sol avec un "bonk" retentissant, et entreprit d'attaquer les... parties des pauvres gars dans la queue. Rapidement, ils s'éloignèrent avec celle-ci entre les jambes, et Axelle put enfin déposer son dû pour participer au prochain combat : une pinte de brune.

Le grand barbu, fort de ses trois victoires, avala la troisième bière avec un rugissement sauvage qui fit frissonner la jeune fille au plus profond d'elle-même. Elle fit craquer ses doigts et délia ses épaules, tandis qu'enfin le perdant descendait du ring trimballé par deux de ses potes hilares. Agile, elle grimpa sur les planches et fit face au majestueux combattant, dont la barbe et la moustache moussaient allègrement.

Elle attendit que sonne le début du combat, dont elle savait qu'il serait loin d'être loyal, et planta son regard dans les yeux de son adversaire, en garde.

"Eh ben. T'as du cran ma ptite ! Tu me plais bien !"

L'homme venait de signer son arrêt de mort. Ou du moins, c'est ce qui se passait dans la tête d'Axelle. "Ma ptite" ? Bon. Garder son calme. Au moins, sa voix trop forte signifiait qu'il avait assez bu compte tenu de sa carrure, et qu'elle avait toutes ses chances. De lui botter le cul, hein. Il se dégourdit les jambes et se mit en garde, puis le gong sonna.

Axelle ne bougea pas. Elle ne voulait pas que son adversaire connaisse son style de combat et s'y prépare. Sa garde, les deux poings simplement près des joues, ne voulait pas dire grand-chose sur elle, et elle attendrait le dernier moment pour bouger. Il envoya un coup dans sa direction, qu'elle esquiva d'un mouvement du buste. Le second passa au-dessus de sa tête de la même façon, et elle fit un petit pas en arrière pour esquiver le crochet suivant. Elle se décida à bouger. Sa garde se modifia, une main plus basse que l'autre, ses épaules se mirent à bouger, ses pieds à sautiller légèrement. Elle était désormais légèrement de profil, et le regardait par en-dessous.

Le grand barbu n'avait pas l'air d'avoir envie de lui faire mal. Tant mieux, car elle ne se gênerait pas, elle. Il n'avait pas d'ouverture dans sa garde, ni au niveau de la tête, ni au niveau des côtes. Il avait l'habitude, cela se voyait, de castagner, peut-être dans des bars. Sa technique n'avait pas l'air d'une finesse incroyable, mais pour la castagne, elle était plus que suffisante.

Le coup qu'il lança était comme les trois autres : un peu mou, sûrement destiné à jauger sans trop abîmer l'adversaire, pour créer des trous dans la garde. Axelle n'attendait que ça. Elle effaça ses épaules et verrouilla son regard sur les côtes de son adversaire, et bougea son bras comme si elle voulait l'y frapper.

Le coup partit de ses hanches, puissant, calculé. Elle pivota légèrement, et son pied vint frapper l'intérieur du genou du barbu.

Axelle jubila intérieurement. Son coup avait touché, et avait déstabilisé mister-mignon-qui-était-décidémment-bourré. Bon, ça n'était pas avec ça qu'elle réussirait à le mettre au tapis, mais c'était un bon début. Si elle avait un peu plus suivi les cours de MMA, elle aurait pu tenter les soumissions, mais ça n'était pas vraiment son rayon. Dommage. Elle devrait se contenter de le frapper et espérer qu'il tombe de fatigue.

Son objectif était clairement le foie. Il avait bu, et ça n'avait pas l'air d'être la première fois : une frappe bien placée au foie et il ne se relèverait pas. Encore fallait-il y accéder, sous la masse de bras musclés et poilus qui le protégeaient, conscients de cette faiblesse. Alors qu'il se redressait et que la foule acclamait le combat, elle comprit que le combat était loin d'être gagné d'avance. Il l'aurait été en environnement ouvert, avec toute la place qu'elle voulait pour bouger. Là, elle devrait lutter pour ne pas se laisser acculer contre les cordes épaisses : si elle se faisait attraper, c'était fini.

Aussi, lorsque le colosse s'élança et l'approcha rapidement, un peu trop rapidement pour ce qu'elle avait espéré de quelqu'un de son gabarit, elle réagit d'instinct. Elle bondit de côté pour éviter de se faire attraper et coincer contre le ring. Le barbu l'attendait au tournant : d'un rapide mouvement du bras, il frappa l'épaule de la jeune fille. Surprise, elle perdit l'équilibre et se sentit partir vers l'arrière. Son cerveau étant éteint, elle se rattrapa d'une roulade et termina en pose-super-héros (mais si vous savez avec une main par terre, une jambe tendue et une jambe pliée là. commme spiderman. voilà comme ça.).

Le problème, c'était qu'elle était désormais à moins d'un mètre du sol, face à un type qui en faisait bien deux ou trois. L'idée furtive de lui sauter à la gorge traversa le cerveau (toujours éteint) d'Axelle, mais il était bien trop stable sur ses jambes pour pouvoir le renverser si facilement. Elle se redressa d'un bond, consciente de sa vulnérabilité, et se remit en garde... Enfin, voulut se remettre en garde. Son bras gauche, qu'elle n'avait pas utilisé pour sa roulade, pendait mollement : le coup du barbu n'avait pas seulement été déstabilisant, il lui avait aussi engourdi le bras par sa force. Elle secoua les épaules, constatant la douleur dans la gauche, et passa en garde crabe, laissant son bras gauche vers le bas tandis que le droit protégeait son visage. Elle dit à voix basse, bien assez fort pour que son adversaire l'entende :

"Pas mal, pour un vieillard..."

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S'il est un spectacle rare dans ce monde, c'est celui d'une femme timide et fragile dans un lieu de débauche. Audrey se maudit d'avoir cédé aux caprices de ses coéquipiers, qui l'avaient suppliée de venir avec eux à cette fête interne à la Némésis. Elle se doutait bien que réunir les pires loubards qu'on puisse trouver sur l'île ne pouvait pas donner un salon de thé, mais elle ne s'était pas douté de l'ampleur de cette incivilité. Par mesure de prudence, elle avait pris un vieux T-shirt à manches longues, un survêtement de jogging et des baskets, avait laissé tomber toute idée de maquillage ou de coiffure, laissant ses cheveux détachés. Cette mesure de prudence ne l'empêcha bien sûr pas de se faire draguer par le premier lourdaud à portée, mais au moins, elle s'était fondu dans la masse grouillante de délinquants. Lorsqu'elle retrouva ses collègues, ceux-ci semblèrent quelque peu déçus : Audrey devait être le bouc émissaire de la soirée, qui devait se faire chambrer par tout le monde, alors la voir inélégante ternissait quelque peu leur jouissance.

Arrivée au bar, elle regarda rapidement les noms des boissons disponibles, écrites au marqueur sur le zinc même. Rien que de l'alcool. Et pas du plus fin. Bien sûr, elle ne s'attendait pas à des bouteilles de jus de goyave, ni même à du champagne ou autre boisson luxueuse, mais lorsqu'elle vit que, de manière générale, c'était soit bière, soit vodka, elle fit un peu la grimace. Un peu désespérée, elle se dit qu'il était alors temps de commencer une sorte d'expérience sociologique. Après tout, la Némésis allait être le milieu dans lequel elle allait baigner pour un bout de temps – du moins, elle l'espérait. Il fallait donc qu'elle sache un peu avec quel genre de personne elle allait devoir coopérer. Sûrement d'anciens malfrats, certes : mais y en avait-il des polis, au moins, des qui n'étaient pas venus juste pour l'alcool et les femmes, des qui se sentaient investis dans une cause, ou alors même des un peu distingués qui n'entrevoyaient dans la Némésis qu'un ascenseur social efficace ? N'y avait-il donc que des brutes sans cervelle ? Elle commanda une bière blonde, histoire de dire qu'elle n'était pas si différente des autres. Quand il lui tendit une pinte, elle soupira d'exaspération. Bon. Et bien elle allait pouvoir tenir toute la soirée à boire ça. Déjà qu'elle buvait rarement de l'alcool – jamais, c'eut été mentir –, alors en plus avec sa taille ridicule et l'odeur peu ragoûtante de la bière, il n'y avait aucune chance pour qu'elle en boive une cul-sec.

Lorsqu'elle entraperçut le ring de boxe, elle n'en crut pas ses yeux. Ils avaient carrément fait venir un tel matériel pour se battre ? N'avaient-ils donc aucune autre passion que la castagne ? Grâce à sa petite taille, Audrey put se frayer un chemin entre deux colosses qui frétillaient à l'idée d'en découdre, entre deux montagnes qui s'échangeaient des liasses de billets résultant de paris divers. Elle parvint sans trop de peine aux premiers rangs, et put observer le combat de près. Il opposait un grand homme barbu, qui semblait avoir déjà bu quelques verres, et une très jeune femme plutôt grande et agile. Elle était plutôt surprise que ce combat ne soit pas entièrement masculin, vue l'ambiance machiste qui régnait dans le hangar – ça, elle pouvait l'affirmer au nombre de main aux fesses qu'elle avait reçue. Le combat semblait serré, du moins c'était ce que disait l'ambiance survoltée autour d'elle.

Audrey se sentait plutôt au milieu des prédateurs qu'autre chose. Aucune tête qu'elle puisse reconnaître, une assemblée clairement masculine, une odeur terrible d'alcool et de transpiration, des élans de démonstration virile, la jeune femme technicienne en laboratoire, sa chope à la main, la serrait comme si elle contenait toute sa vie. Lorsqu'elle vit John, l'un de ses collègues, lui aussi aux premières loges du spectacle, elle se dirigea vers lui, pour se sentir moins seule.

« Ah, mais t'es là, toi ! Allez, viens, après, c'est toi qui monte sur le ring ! »

Les yeux béants d'effroi, Audrey ne put se retenir de crier de sa voix de crécelle :

« Mais ça va pas la tête ! J'oserais même pas toucher l'adversaire ! »
« Allez, viens, ce sera drôle ! »
« Mais non, crétin ! »

Lorsqu'il tenta de lui agripper la main pour la forcer à le suivre, elle eut un réflexe de petite mamie : frapper avec son sac à main.

Seulement, son sac à main, c'était sa chope de bière.

L'agitation se fit se retourner les brigands qui se trouvaient autour ; et lorsqu'ils virent qu'une petite femme venait de fracasser une pinte sur le crâne d'un gars qui devait faire deux têtes de plus qu'elle, ils n'eurent qu'un mot : « BASTON GÉNÉRAAAAAALE ! ».

Au milieu de tout ça, Audrey se précipita vers son camarade, sortant un vieux mouchoir de sa poche pour essuyer son crâne ensanglanté – une simple plaie, rien de bien grave – et absorber l'alcool. Le gaillard, un sourire en coin, lui murmura :

« Pourtant, t'aurais fait une bonne combattante, hein ... »
« Je suis désolée, j'ai pas maîtrisé ma force … »
« Haha, la petite Audrey, toujours cachée, discrète, et quand tu t'y attends le moins, elle te fracasse le crâne … Bon, t'as gagné, tu t'es déjà battu ce soir, pas la peine d'en remettre une couche … »

Audrey lui sourit, dans une atmosphère de cogne aussi bien sur le ring qu'en dehors.

Axelle était dans le pétrin. Entre son bras engourdi et son mauvais positionnement sur le ring, son adversaire pouvait ne faire qu'une bouchée d'elle. Ou comme il l'avait dit plutôt, lui donner "la fessée". Il se rapprocha d'elle rapidement, prêt à l'attraper comme une gamine de trois ans. Elle attendit le dernier moment, et bondit sur le côté, en se baissant cette fois pour ne pas se faire frapper à nouveau.

Le barbu n'en démordit pas : il avait trouvé la technique et n'allait sûrement pas la laisser passer de sitôt. Axelle devait gagner du temps. Elle se fatiguait, tandis que l'autre n'avait qu'à s'approcher tranquillement et la dominer de toute sa masse. Elle feinta à droite et tenta de placer un direct dans le pif du barbu, mais celui-ci n'eut qu'à lever les mains et para tranquillement.

Soudain, un bruit de chope brisé suivit d'un silence lui donna une seconde de répit. Toute l'agitation du bar cessa d'un coup, avant qu'une voix ne lance :

BASTON GENERALE !

C'était sa chance. Alors que les chopes de bières, chaises, queues de billard et autres Pokéballs se mirent à voler en tous sens, Axelle émit un sifflement suraigu, presque inaudible. C'était le signal que Rocaille attendait. La Racaillou, trop heureuse de pouvoir aider sa Dresseuse à faire un sale coup, se positionna juste derrière les pieds de mister barbu, et lui attrapa tranquillement une jambe, puis l'autre, et serra de toutes ses forces.

Tout autour, le chaos faisait rage. La petite sbire qui avait frappé son collègue de sa chope était désormais en train de lui éponger délicatement le front avec un mouchoir qui avait dû coûter plus que tout le mobilier présent dans la pièce (ce qui était loin d'être un exploit), sans se soucier des nombreuses choses qui volaient autour d'eux. Quel mignon petit couple, songea un coin de l'esprit d'Axelle.

En voyant son adversaire tomber dans son piège, celle-ci exulta. Bon, certes, c'était loin d'être loyal, mais elle n'aurait jamais eu la moindre chance de remporter ce combat de façon loyale... Et elle n'aurait même pas essayé de monter sur le ring, d'ailleurs. Rocaille avait réussi son coup. Les deux jambes prises au piège, le barbu s'était retourné pour essayer de comprendre ce qui se passait, offrant son postérieur rebondi au regard de la jeune fille. Celle-ci sourit, prête à narguer son adversaire cloué au sol.

Soudain, alertée par un cri ou une impression captée du coin de l'oeil, elle fit un léger bond de côté pour esquiver une chaise qui arrivait droit sur elle. Sauf que maintenant, la chaise arrivait sur son adversaire. Celui-ci, bloqué par Rocaille, se prit la pièce de mobilier au milieu du dos. Celle-ci n'était ni rapide ni très lourde, mais elle suffit à pousser légèrement le colosse pris au piège vers l'avant. Axelle ouvrit les yeux en grand, et rentra la tête dans les épaules dans l'attente du choc qui ne manquerait pas d'ébranler le ring.

Un beau bordel, c'est comme ça qu'on pouvait définir la salle au moment où Mickaël y pénétra, visiblement, la petite fête journalière des Némésis avait déjà viré à la baston générale. A peine la porte ouverte, il du esquiver une pinte entrain d'expérimentée le vol sans gouvernail et qui fonçait droit sur sa tronche. Tout juste eut-il le temps de se relever pour constater la présence du ring au milieu de la salle, qu'un type valsa au sol. Un jeune blanc bec sans doute présent pour faire l'intéressant. Le fait de se retrouver le dos frappant le sol et le poignet tordu avait sans doute du le calmer. Dire que l'Unysien avait juste eu besoin de tendre le pied.

« Coucouche panier, gamin ».

Et c'était reparti pour jouer des coudes pendant qu'il essayait d'atteindre le bar, qui étrangement semblait relativement épargné, comme quoi, la bière restait sacrée, on évitait de trop gaspiller, même en cas de bagarre générale. Et les coups continuait de pleuvoir. Avancer était quelque chose d'assez difficile dans le bordel ambiant, après fallait dire qu'une quarantaine de Némesis dans une salle prévue pour en théorie un tiers de moins, la cohue était rapide à former. Pendant qu'il luttait et envoya valdinguer deux autres types sans manquer de prendre quelque coup, il  manqua de tomber sur une sbire entrain de s'occuper d'un de ces camarade avec le front en sang. La main du bonhomme manqua d'y passer d'ailleurs, mais le néo-Némésis, qui était arrivé depuis tout juste deux semaines dans l'organisation continuait de progresser vers sa cible.

Sur le ring de ce qu'il pouvait voir un gars assez costaud était entrain de se faire botter le cul par une sorte de crevette, qui c'était fait aidé de son Racaillou. Bien joué, qui avait donc qu'on faisait selon les règles, maligne la gamine. 'Fin, à force de castagner Mickaël avait fini par atteindre la zone du bar, mais vu le bordel ambiant, pas la peine d'espérer finir une bière. Y'avait pas grand-chose qui le retenait d'user d'une manière un peu moins subtil, m'enfin, ça allait bien finir par se calmer.